L'histoire de cette jeune femme ressemble de près ou de loin à celle d'un de ces films d'horreur typique. Amityville, l'exorciste... vous voyez de quoi on parle.
Évidement, avant que les problèmes ne commencent, tout se passait parfaitement bien. Haylee Pearce, élève modèle, enfant que l'on pourrait qualifier de "bien dans sa peau". Sociable, très douée en dessin, elle passe son temps à gratter son calepin et immortaliser tout ce qu'elle voit.
Haylee est, ou du moins était une jeune fille sans le moindre problème. Mais bien sûr, le sort en avait décidé autrement. L'année de ses 22 ans, alors qu'elle était en plein tournant dans ses études, prête à intégrer une fac très réputée, tout bascule.
Atroces migraines, fièvre presque constante. Poussée de stress et d'angoisse sans aucune raison. Haylee avait tout l'air d'être malade. Mais après de nombreux examens médicaux, on ne trouva aucune explication. Haylee passa plus d'un an à enchaîner les analyses et autres tests médicaux sans succès... Jusqu'à ce jour...

« Chéri, tu devrais venir voir ! Haylee est brûlante et se tord de douleur. Je ne sais plus quoi faire..." Daniel Pearce suivi sa femme dans la chambre de Haylee. Et en effet, la jeune fille était en nage, gémissait de douleur et ne cessait de bouger, comme si elle faisait un horrible cauchemar. Ils se regardèrent dans les yeux, bien trop faibles face à cette situation, incapables de faire quelque chose. Leur fille souffrait, et même les médecins n'y pouvaient rien.
Soudain, Haylee se calma. Ses yeux étaient maintenant ouverts. Ouverts, mais vides. Elle semblait totalement ailleurs, livide, et regardait le plafond.

Était-elle morte ? Non, sa main bougeait légèrement, comme un tic nerveux. Elle respirait lentement, et difficilement. « Haylee, ma chérie, ça va ? » Aucune réponse. Elle tourna seulement sa tête, lentement, en direction de ses parents. Elle murmura quelques mots, presque inaudibles et incompréhensibles. Puis, un hurlement effrayant se fit entendre dans la petite maison des Pearce. Suivi bientôt d'un deuxième.
Alertée par ces cris, madame Anderson, la voisine, couru à sa fenêtre. La seule chose qu'elle put voir, ce soir-là, fut la maison des Pearce qui prenait feu, et une silhouette sortir en courant par le jardin, puis disparaître dans le petit bois. Elle appela aussitôt les secours.

« Le crime s'est déroulé dans la chambre de la fille. Le feu s'est déclaré dans le salon, mais les pompiers sont arrivés à temps pour tout éteindre avant que la maison ne brûle entièrement. Evelyne Pearce a été retrouvée par terre. On dirait que tous ses os ont été brisés, un peu comme si on l'avait passé dans un broyeur. Son mari, Daniel Pearce, est quant à lui, littéralement cloué au mur, par des crayons. Et ce qui est étrange, c'est que le tueur semble avoir fait exprès d'imiter la position du Christ, à l'envers.. Par contre, aucune trace de leur fille, Haylee. Elle a peut être été kidnappée par le tueur ou bien elle a réussi à s'enfuir. Il faut lancer des recherches ! »

Mais les recherches ne donnèrent aucun résultat. Après plusieurs mois, la police retrouva un corps entièrement carbonisé et broyé près d'un bois. Ne pouvant retrouver L'ADN de la victime, ils firent le rapprochement avec le meurtre des Pearce. Il devait certainement s'agir d'Haylee Pearce. L'affaire était réglée.

Nouvelle Orléans, 2014.
Une jeune femme s'avançait d'un pas nonchalant dans la nuit froide et humide, en ce 15 janvier 2014. Elle semblait perdue, ou simplement fatiguée. Son visage était à moitié caché par son long manteau. La rue était déserte et silencieuse. Ce quartier craignait un peu. Mais elle n'avait pas eu d'autres choix que de s'installer ici. Tout ça n'était pas prévu. Elle avait plus ou moins tout planifié à son arrivée dans cette ville. Sa sœur habitait ici, ou du moins, était censée habiter quelque part à Nouvelle Orléans. Plusieurs coups de fil, messages. Tous restés sans réponse. Elle avait tenté le coup, dans le doute, peut-être la trouverait-elle ?

Après plus d'un mois de recherches, elle s'était rendue à l'évidence. Sa sœur avait certainement déménagé... De toute façon, qu'aurait-elle bien pu espérer ? Elle n'avait eu aucune nouvelle depuis plus de 8 ans. Elle devait avoir 30 ans maintenant. Entre-temps, la jeune femme s'était trouvé un petit appartement, avec le peu d'argent qui lui restait. Débuts difficiles. Elle fit le tour de la ville, en espérant trouver rapidement un travail. Ce qui ne s'avéra pas si difficile, finalement... Et elle ne se demanda pas longtemps pourquoi.

Elle s'engouffra dans un petit café du quartier. À cette heure, il n'y avait presque personne. 25 ans, cheveux châtains, sourire amical. Elle avait déjà enfilé sa chemise de travail et partie voir ses premiers clients. Visage d'ange au milieu de ce trou à rats. Voilà maintenant le quotidien de cette jeune femme, au passé flou et sans réponses.
La mort de ses parents était et restera certainement un mystère pour elle. Elle n'en a aucun souvenir, avant de retrouver leurs corps dans sa chambre et la maison en feu. Elle se souvient avoir paniqué et s'être enfui.

Aujourd'hui encore, elle se demande si elle n'est pas fautive dans ce meurtre... pourquoi ne se rappelle-t-elle de rien ? Pourquoi n'a-t-elle rien eu ? Elle est persuadée d'être folle....

Une journée comme une autre. Le quotidien d'une jeune femme qui n'a pas d'autre occupation que d'aller bosser et crayonner sur un bout de papier, vous connaissez ?
Emmerdant, je vous l'accorde. Haylee s'en contentait très bien, pourtant. Vu qu'elle ne pouvait faire que ça. La seule fois où, depuis son arrivée à la Nouvelle Orléans, elle a tenté de se montrer sociable et a abordé un joli garçon, elle eut la réelle impression de l'avoir vu pleurer du sang et pousser un cri plus qu'effrayant. Étrange, n'est-ce pas ? Depuis ce jour, Haylee passe ses journées à traverser les rues en baissant les yeux et esquivant le regard des autres, par peur d'avoir encore ce genre de vision. Elle doit certainement être devenue folle, c'est la seule explication. Et aller voir un psy . Jamais de la vie ! À quoi bon se faire retourner le cerveau.

Haylee s'installa comme à son habitude à ce banc, dans un coin du parc où elle se rendait presque tous les jours, un peu avant son service. Elle sortit de son sac, un petit calepin et un crayon à papier. Pendant près de cinq minutes, elle tourna les pages, et regarda ses croquis, cherchant encore et toujours, pourquoi les seules idées qui lui venaient à l'esprit étaient des dessins aussi sombres et effrayants. Des silhouettes inhumaines. Des visages défigurés. Des rues dans un décor d'apocalypse. Elle se rendit à une nouvelle page blanche et se lança dans un nouveau croquis, sans trop savoir encore ce qu'elle allait faire. Quelques traits incertains, Haylee relevait de temps en temps les yeux vers le paysage qui s'offrait à elle. Sa main glissait sur le papier, on avait presque l'impression que c'était elle qui contrôlait les gestes... Haylee s'arrêta soudain, son dessin était quasiment fini. Mais encore une fois, quelque chose était venu tout gâché. Cette silhouette obscure, presque cachée derrière un buisson. Elle releva brusquement la tête vers l'endroit en question. Mais rien. Personne. Encore son imagination ? Certainement.
Elle observa plus attentivement son dessin. Cette silhouette était grande et fine, son visage était très peu détaillé, on distinguait simplement deux grands yeux. Il avait presque l'air humain, mais ne l'était pas, c'était certain.

Haylee referma son calepin, le regard perdu dans le vide. Pourquoi sur tous ses croquis, il fallait qu'elle dessine quelqu'un ? Pourtant, elle avait toujours dessiné ce qu'elle voyait. Mais il n'y avait jamais personne sur les paysages qu'elle recopiait.
Elle rangeait ses affaires et se releva, jetant un coup d’œil aux alentours, puis elle prit le chemin du café dans lequel elle travaillait. Cette journée allait être longue. Ce boulot lui permettait, certes, de se forcer à parler à des personnes, mais son patron était un vrai connard, et profitait de sa timidité et sa sensibilité, pour lui ajouter des heures, sachant pertinemment qu'elle ne dirait jamais rien. Et c'était le cas. Haylee se laissait facilement marcher sur les pieds. Trop gentille, trop fragile psychologiquement, physiquement aussi parfois. Elle fermait sa gueule, et elle avançait comme elle pouvait...