Le calme était de retour après la tempête, comme si rien ne s'était passé, de nombreux objets gisaient au sol de sa chambre ; il était épuisé par ses propres délires ; quand est-ce que tout cela allait cesser ? Il ne savait pas, il n'aimait pas vraiment quand Tamina n'était pas auprès de lui, il ne se sentait décidément pas en sécurité sans elle. Il sortait de sa chambre, ses yeux bleus guettant le moindre dangers qui profilaient à l'horizon, il fallait dire que parfois les esprits n'étaient pas ce qu'il y avait de plus tendre avec lui ; il ne savait pas pourquoi les choses se passaient ainsi. Maddox voulait juste qu'on l'aime, il voulait juste qu'on soit son ami, pourquoi était-ce si compliqué ? Ses pieds se faisaient hésitant sur le parquet de son propre appartement, il voulait juste se sentir rassuré à cet instant ; qu'on lui dise que c'était fini que personne ne lui fera plus de mal. Perturbé, il était pied nus et c'était bien une chose qui le mettait mal à l'aise, décoiffé, torse nu dans le jogging de son pijama, il avait l'air d'avoir couru des centaines de mètres ; mais il était bien resté chez lui, tourmenté par on ne savait quel esprit qui avait tenté une fois de plus de prendre possession de son être. Il y avait bien des médiums complexes à posséder, mais Maddox faisaient partis des cas les plus compliqués, il fallait pour l'esprit gagner énormément d'énergie avant de tenter sa chance car sans le savoir le dément possédait grâce à cette folie pure qui le rongeait bien des mécanismes de défenses.

S'aventurant dans le salon, il vit alors l'image de la télévision éteinte devenir grisonnante cette télé donc l'interrupteur était enfermé dans le meuble par pour sécurité de sa personne qui voyait probablement bien assez d'images choquantes pour aggraver son cas. S'approchant doucement avant de s'asseoir sur l'accoudoir du fauteuil juste à coté, se penchant vers celle-ci pour constater qu'elle était éteinte et qu'il pouvait même voir son reflet dans l'écran plasma, un léger grésillement sortait des hauts parleurs et il demandait à mi-voix encore fragile de ce qu'il venait de vivre dans sa chambre « C'est toi ? » Il songeait bien que si les médecins de l'asile l'auraient vu causer avec la télévision ils auraient augmentés les gouttes de neuroleptique du soir ; mais il aurait riposté en disant qu'il y avait quelqu'un dedans, quelqu'un qui lui parlait. Et probablement qu'on aurait triplé la dose jusqu'à le rendre légume. Non, dans le monde « normal », il n'y a personne qui vous parle dans la télévision, il n'y a personne qui vous parle dans les miroirs... Ils pensaient tout savoir les docteurs, mais ils ne sont qu'aveugles. Que penserait Tamina ? Fort heureusement, elle n'était plus là à cette heure ci, il ne voulait pas imaginer son regard triste par sa faute parce qu'il voyait des choses qu'elle ne voulait ou pouvait comprendre.

Fermant doucement les yeux avant de fixer de nouveau son reflet dans le plasma « C’est toi ? » Demandait-il à nouveau, il fallait dire que cet esprit qui occupait sa télévision n’avait jamais été agressif envers sa personne, bien au contraire. Posant la main sur l’écran de la télé, probablement sa tutrice allait se demander pourquoi il y avait encore plein de traces de doigts sur celle-ci… « Pourquoi tu as peur… Ils sont partis les autres… » Lui disait-il, il ne voulait pas qu’elle s’en aille maintenant ; il voulait qu’elle reste avec lui parce qu’il se sentait seul à présent. « Reste avec moi… »

Elle disait qu'elle n'aimait pas les autres alors qu'il lui avait assuré qu'ils étaient tous partis. Il voulait qu'elle reste avec lui, il ne savait pas vraiment si elle pouvait le voir, il fallait dire qu'il n'était pas vraiment présentable bien qu'il n'y avait à priori rien de choquant, mais Maddox avait une image de lui-même tout à fait perturbée, se considérant comme tout simplement horrible à voir et cela depuis qu'Alexey l'avait tout simplement frappé sans ménagement laissant bourgeonner sur son corps de nombreux hématomes et quelques fractures. Il avait réussi à échapper à cet enfer ; du moins c'était ce que l'on disait. L'enfer ne cesserait probablement jamais. La peur sera toujours là. Il ne pourrait pas lui échapper, et toujours il y aura ce dégoût de sa propre personne parce que dans le miroir il ne pouvait voir que le reflet d'un homme brisé. Le dément continuait de fixer l'écran plasma mais comme bien souvent il finissait par fuir sa propre image, ne supportant plus de se voir, ne supportant plus d'être dans ce corps qui ne lui avait plus appartenu. Dans ce corps marqué par Alexey, possédé par celui-ci. Dans le fond, ce corps appartiendra toujours à cet homme et à cette emprise qu'il avait eut sur lui. C'est alors qu'elle lui demandait comme il se portait ce jour là, se blottissant un peu plus sur l'accoudoir du fauteuil, laissant la peau nue de son torse frotter contre le tissu doux qui réconfortait. « Je crois que ça va... » Disons que cela aurait pu être bien pire, il connaissait vraiment pire. Relevant les yeux vers l'écran il pouvait voir son reflet encore une fois et il passait doucement sa main sur son torse comme pour chercher à se cacher derrière celle-ci alors que ses yeux cherchaient a couverture du canapé pour se planquer dessous, mais elle n'était pas là. Est-ce qu'elle pouvait le voir puisque lui ne pouvait pas la voir ?

« Est-ce que les autres te font du mal à toi aussi ? » A lui on lui faisait du mal, mais la nature de Maddox se voulait de celle qui culpabilise parce qu'il n'avait pas d'amis, parce qu'il se sentait affreusement seul et ferait n'importe quoi pour qu'on l'aime. Ce besoin qu'il avait des autres, ce besoin d'être aimé parce qu'il voulait juste aimer, juste vivre. Il était un homme qui avait beaucoup à donner, un homme qui n'était que vie et pourtant bien trop tourmenté par la mort. Il voulait juste vivre, mais tout le rattrapait. On le considérait comme fou, comme faible. Il ne voulait rien y croire, il vivait avec sa peine comme tout le monde. Se penchant doucement en avant vers la télévision pour poser ses doigts sur l'écran pour souffler « Est-ce que tu peux me voir ? Je ne te vois pas... Pourquoi tu te caches ? » Etait-elle abîmée ? Avait-elle peur de son image ? Alors peut-être lui ressemblait-elle plus qu'il ne le pensait. Il se demandait pourquoi elle ne voulait pas qu'il la voit, il se demandait à quoi elle ressemblait. Tant de questions qui le fascinaient...

Il était rassuré de savoir que les autres ne tourmentaient pas la jeune femme, elle ne le méritait pas. Elle était si gentille ; il songeait que si les esprits étaient si cruels avec lui c'était bien parce qu'il faisait des choses mal. Sans quoi, cela n'aurait aucune raison. Mais il n'y avait aucune raison. Il lui fit part de son désir de la voir et elle le fit. Lui disant de regarder avec attention l'écran, se penchant alors son regard fasciné qui scrutait l'écran plasma quand il aperçu ses lèvres lui sourire et doucement sur sa gueule d'ange se dessinait un tendre sourire en réponse. Pourquoi disait-elle qu'elle avait une sale tête ? A vrai dire, il avait vu tellement de vision d'une horreur sans pareil, grand nombre des esprits qui le hantaient étaient défigurés, elle était belle à ses yeux. Un peu pâle, l'air maladive. Il était tout ce qu'il y avait de plus fasciné par le visage de cette femme en lui répondant « Non... Tu as une jolie tête. » Il ne savait pas vraiment si c'était un compliment digne des plus grands flatteurs, il fallait dire que Maddox et son coté grand enfant avait bien du mal à jouer les grands numéro de charme surtout lorsque sa propre image corporelle était perturbée. C'est alors qu'elle disparu et mourrait lentement son sourire. Posant les doigts sur l'écran noir, il aurait juste voulu qu'elle reste encore un peu, qu'il puisse la voir encore parce qu'elle était vraiment mystérieuse et intrigantes à ses yeux.

C'est alors qu'elle lui disait qu'elle pouvait le voir et il se sentait assez mal à l'aise parce qu'il n'était pas vraiment dans une tenue digne de discuter avec une jeune femme. Mais elle lui disait de se concentrer pour la voir. Cherchant du regard, sa voix avait changé, elle n'était plus dans sa télévision. Il essayait de repenser à tout ce que lui avait dit Nitzan sur sa respiration. S'asseyant un peu mieux sur le canapé « Je peux essayer... » Soufflait-il avant de fermer les yeux. Les mythes des esprits, tout ce que lui avait dit Nitzan, c'était tout à fait confus dans son esprit... Puis enfin, il ouvrait les yeux... Une ombre trouble sur le tapis ; doucement il se laissait glisser à genoux pour lui faire face, plissant les yeux comme s'il y avait de la brume face à lui « C'est vraiment difficile de te voir... Il y a beaucoup de nuages chez toi... » Il souriait amusé avant de retrousser le museau en essayant de se concentrer un peu plus encore. Ne la quittant pas du regard et ses yeux bruns lentement s'offraient au regard azuré de Prince qui avait décidément bien trop de mal à contrôler ses dons de médium qui étaient tout à fait particuliers. Personne ne lui avait jamais appris avant qu'il ne rencontre Nitzan tout à fait par hasard. [color=teal« J'aimerai tellement te voir... Tes yeux sont très sombres... »[/color] Passant doucement le bout de sa langue sur ses lèvres pour se concentrer, ses yeux bleus étaient justes absorbés par ceux de la jeune femme. « D'habitude je n'ai pas à faire tout ça... J'entends toujours très bien les voix et... On me montre des choses... Est-ce que je peux voir tous ces gens qui me parlent ? Et toi tu peux les voir les voix ? » Il se posait beaucoup de questions sur cette vie, il voulait connaître celle de la jeune femme aussi ; après tout ils étaient amis à présent non ?

Maddox essayait de voir Solene un peu plus encore, c'était une épreuve difficile. Il pouvait distinguer les contours de sa silhouette mais il avait bien du mal à voir les détails de son visage, des vêtements qu'elle portait... Il parlait de nuage, elle lui demandait d'imaginer une fenêtre de laquelle il devait pousser les rideaux, mais comment pousser des rideaux sans les mains ? Il essayait de se concentrer encore un peu plus, probablement était-il bien trop déstabilisé par le fait qu'elle puisse le voir. Il avait l'impression que plus il se concentrait pour la voir, plus il sentait le poids de ses yeux sur son être... Il craignait que s'il partait chercher un tee-shirt pour se couvrir qu'elle disparaisse pour le laisser ici, seul. A la proie des autres. Mais encouragé par la jeune femme, il se concentrait un peu plus encore jusqu'à enfin distinguer les traits de son beau visage, ce n'était pas vraiment parfait, ce n'était pas la même façon dont il pouvait voir Alastair où parfois il avait l'impression de voir quelqu'un de « réel » qu'il puisse toucher. Mais Alastair n'avait pas de corps tout comme Solene, il ne comprenait pas pourquoi. Certes, ils étaient morts. Mais pourquoi le corps disparaissait ? Pourquoi est-ce que l'on meurt tout simplement si c'est pour vivre encore ? Tant de questions auxquelles on ne pouvait pas répondre bien évidement ; le laissant comme toujours dans le flou. Dessinant doucement un sourire sur ses lèvres bien qu'il n'était pas vraiment à son aise devant les grands yeux magnifique de l'esprit qui le fixait ; il posait les fesses sur ses talons, toujours agenouillé face à la demoiselle assise sur son tapis.

Les esprits étaient les seuls à lui tenir compagnie depuis toutes ses années ; il était seul et il ne comptait pour personne. Il avait le droit à quelque coup de fil de sa famille lointaine lors de grandes occasions comme thanksgiving ou ses anniversaires comme si on voulait juste s'assurer qu'il était encore vivant ; mais il n'était jamais assez intéressant pour qu'on veuille le voir où qu'on l'invite lors de l'un des repas de famille où il se mettrait encore à parler seul ; un comportement qui dérangeait les convives. On avait cessé de l'inviter depuis bien longtemps et il restait seul, attendant la visite des esprits. C'est alors qu'elle lui disait que tous les esprits ne lui voulaient pas que du bien, qu'il devait apprendre à se défendre de ceux qui lui voulaient des peines. Baissant lentement les yeux avant de regarder de nouveau l'esprit pour lui répondre « Peut-être ne sont-ils pas tous aimables ; mais tu sais... Moi je ne vois personne d'autres... Les gens, ils disent tous que je suis fou. Ils veulent tous m'enfermer dans cet hôpital. J'y suis déjà allé deux fois ; ils m'ont fait mal... Plus de mal, que les esprits ne peuvent m'en faire ici. » Croisant doucement les bras autour de son torse un peu comme le ferait un autiste pour se comprimer son torse étroit afin de contenir sa peur ; il était rare qu'il parle de ce qu'il avait vécu là bas... Ses yeux bleus brillaient de larmes à présent, à fleur de peau par ses souvenirs douloureux. « Personne ici, ne peut me toucher... Ne me touchez pas monsieur ; s'il vous plait... Pourquoi personne ne veut m'aider ? »

Perdu dans l'abysse de ses souvenirs, laissant couler une larme le long de sa gueule d'ange avant d'entendre un léger son, tournant la tête assez brusquement vers le poste de radio qui venait de s'allumer ; gommant cette larme avec l'intérieur de son poignet avant de regarder de nouveau l'esprit qui se tenait là, lui demandant un léger sourire accroché sur les lèvres « C'est toi qui peut faire ça ? » C'était cette ambivalence qui lui permettait toujours d'échapper à ses larmes à la première distraction, cette même ambivalence qui lui permettait de ne jamais tomber sous la domination d'un esprit, qui lui permettait de surmonter ce qu'on lui forçait à voir, les scènes horribles qu'il dessinait avant de passer outre ; laissant ses souvenirs partir au fond de sa mémoire alors que d'autres, ceux de sa vie personnelles qui revenaient toujours à lui.

Personne ne savait comment l’aider, Maddox se sentait tout simplement perdu, il ne comprenait pas pourquoi personne ne savait l’aider… Il n’avait pas entendu cette remarque de la bouche de l’esprit, sans quoi probablement en serait-il sorti bien plus brisé encore. Il ne voulait pas être seul, il voulait croire qu’on voulait le secourir, qu’on ne l’abandonnerait jamais. Elle le sortait de sa stupeur en allumant la radio, observant la jeune femme avec un léger sourire ; comment est-ce qu’elle pouvait faire ça sans toucher la radio ? Il était comme un gosse ébahit face à un tour de magie dont il n’arrivait à comprendre le secret. Elle lui disait alors qu’il pouvait aller finir de s’habiller et qu’elle ne bougerait pas ; se relevant lentement sans la quitter des yeux comme s’il voulait vraiment être sur qu’elle ne partirait pas, plus il s’éloignait et plus elle devenait floue à ses yeux car il était bien moins concentré sur elle. Poussant la porte de sa chambre il attrapait sa chemise qu’il s’empressait d’enfiler avant d’attraper un gilet qu’il passait par-dessus le tout, il se sentait bien plus à l’aise à cet instant. Toujours nus pieds sur le parquet il revenait à pas lents ; la cherchant encore des yeux et constatait qu’elle était toujours à la même place. Se posant de nouveau au sol, alors qu’elle lui souriait il lui rendait cet adorable sourire avant de lui demander. « Ici il ne fait pas vraiment froid, je ne supporte plus qu’on me regarde… Est-ce que tu as froid toi ? » Est-ce qu’elle pouvait sentir le vent dehors ? Les rayons du soleil ? Est-ce que la pluie la trempait ou la laissait intacte, est-ce que la neige lui donnait froid ou est-ce qu’elle avait toujours chaud ?

Puis enfin il répondait à la question de Solène vis-à-vis de ses dessins qui suscitait toujours la curiosité des esprits qui fouillaient souvent ses œuvres à la recherche d’un souvenir qui leur appartiendrait. « Je crois… C’est juste dans ma tête et je dessine. Des fois ça fait peur et quand je dessine après j’ai moins peur. J’ai parfois l’impression que c’est mes souvenirs, mais… Je sais que ce n’est pas moi, mais ces vies semblent être les miennes. Je sais même plus ce qui est à moi, ce qui est à eux… Je passe ma vie à dessiner les leurs, alors c’est comme les miennes… » Observant la jeune femme sans trop savoir ce qu’elle penserait de lui ; baissant les yeux. Les gens le prenaient pour un fou, ils ne voulaient pas le croire parce que c’était insensé, parce que le monde de Maddox n’était à leurs yeux qu’une stupide invention de son imagination tordue qu’il fallait soigner en le ligotant, l’enfermant, lui faisant des injections… Il ne voulait pas de tout ça, il ne voulait pas de ce monde alors il préférait se réfugier dans celui-ci parce qu’il n’aurait de toute façon jamais de vie qui lui appartienne.