Eliana avait été pincée et elle était dans une position délicate. Elle devait se trouver un avocat et vite. On la soupçonnait de beaucoup de choses, mais vente de drogue était en tête de liste. La femme avait été interrogée, on l'avait relâchée, mais elle devait trouver un avocat et vite. Alors que ses hommes s'agitaient pour lui trouver un avocat, elle repensa à Crossfire. Il l'avait déjà défendue une fois concernant un autre cas de vente de drogue soupçonnée. Il s'en était admirablement bien sorti. Elle fit claquer ses doigts et demanda à un des hommes d'appeler l'avocat pour demander un rendez-vous au plus vite. On lui servit ensuite un verre d'alcool et elle se laissa aller contre son petit fauteuil moelleux tandis qu'elle congédia la prostituée qui venait de lui faire une petite révérence. Eliana buvait son verre pensivement. Elle n'était pas tout à fait dans son assiette. Ce n'était pas son travail qui l'inquiétait, c'était Aaliyah. Sa petite n'allait pas fort bien à l'école. Sa mère l'avait appelée la veille pour lui signaler que sa petite fille était paresseuse et qu'il faudrait peut-être avoir une discussion sérieuse avec elle.

La cheffe de gang comprenait que sa fille soit perturbée. Après tout, à son âge, Eliana avait déjà un copain et aurait quatre ans plus tard sa fille. Elle savait aussi que la période avant Noël rendait Aaliyah étrange. Chacun gérait à sa manière la période des fêtes. Un employé revint auprès de sa cheffe et signala que le rendez-vous était pris et qu'elle pouvait se déplacer, parfait. Eliana termina son verre cul sec et se leva de son siège. Sa robe noire moulait parfaitement ses formes. On ne le voyait pas, mais elle portait un holster de cuisse avec une arme dedans. On n'était jamais trop prudent, surtout dans ce genre de milieu. Elle enfila un petit manteau d'hiver qui s'arrêtait au-dessus de ses fesses. Eliana était comme d'habitude, perchée sur des hauts talons vertigineux. Elle aimait la hauteur, surtout qu'elle faisait juste un mètre soixante-trois. Ce n'était pas une géante.

Elle grimpa dans une voiture qui l'attendait devant l'entrée de son entrepôt et on la conduisit calmement dans Downtown, un quartier plutôt bien avec tous les lieux administratifs de la ville. On la déposa devant le cabinet de Crossfire, Eliana entra dans l'immense bâtiment et prit l'ascenseur pour arriver au bon étage. Elle ne savait pas ce qu'elle allait dire à son avocat, la vérité ? Peut-être bien. Il semblait être le genre qui défendait à peu près tout le monde, même les plus ripoux. Après tout, tout le monde avait le droit à un avocat et à la justice, n'est-ce pas ? Ce fut une secrétaire qui l'accueillit et l'accompagna jusqu'au bureau où elle ouvrit calmement la porte. Eliana regarda Crossfire qui souriait d'un air avenant. Elle trouvait ce type louche. Comment pouvait-il sourire ainsi et la défendre ? Elle avait l'impression de ne pas avoir une pièce du puzzle.

« Monsieur Crossfire, bonjour. »

Elle s'installa calmement sur la chaise pour les visiteurs et retira sa veste avant de se retourner et de la déposer sur le dossier de la chaise avec un calme évident. Eliana Zara n'était pas inquiète d'avoir des charges à son encontre, bien au contraire. C'était le but du jeu. De temps en temps les méchants policiers vous tombaient dessus pour vous demander des comptes. Même si en ce moment, ils avaient autre chose à faire de leur temps.

« Bon, on ne va pas passer par quatre chemins. Vous savez probablement que j'ai été accusée de vente de drogue. Je ne vais pas vous apprendre votre métier, vous savez quoi chercher pour faire capoter l'enquête. Je peux avoir un café ? Et allumer une cigarette ? »

Sans attendre plus longtemps, elle sortit son paquet cigarette de sa poche de manteau, mais attendit calmement qu'il dise oui. Elle était encore polie, si on pouvait dire les choses ainsi. Éduquée n'était pas forcément le mot qui convenait, même si sa mère vous dirait volontiers qu'elle l'avait élevée dans les règles de l'art.

Eliana avait envie de lui faire manger son sourire. La brune ne dit rien quand il commanda un verre d'eau et non pas un café. Au prix qu'elle le payait, il aurait pu être un peu plus généreux, n'est-ce pas ? Apparemment pas du tout. Elle rangea son paquet de cigarettes comme il le demanda alors qu'elle le regarda se rasseoir et regarder son dossier. Elle le trouvait un peu théâtral, mais elle s'en fichait. Pour elle ne comptait que le résultat et si le résultat lui convenait, alors elle était très contente. Un bruit dans son dos l'alerta que quelqu'un d'autre était entré, mais elle ne broncha pas tandis que la secrétaire déposa un verre d'eau devant elle. Eliana se pencha en avant et l'attrapa pour boire une gorgée tandis que son avocat lui demanda si elle était coupable. Lentement, elle reposa son verre et le regarda droit dans les yeux.

« Bien sûr que non je ne suis pas coupable. Vous ne devriez pas tenir ce genre de discours voyons ! »

Elle pencha la tête de côté en faisant claquer sa langue contre son palet en signe de mécontentement, ne voulant pas se laisser faire. Elle ne se laisserait pas accuser, même si elle l'était. Il suffisait de poser un micro ici et elle serait déclarée coupable. Bien entendu, la pratique ne serait pas considérée comme recevable, mais on ne savait jamais. La cheffe de gang se laissa aller en arrière, son coude posé sur le dos de la chaise tout en toisant cet Adam. Il était différent des hommes qu'elle avait pu rencontrer. Il y avait quelque chose en lui qui la dérangeait. Mais elle n'arrivait pas à mettre le doigt dessus. Elle était du moins convaincue que s'il l'aidait sans broncher, c'était qu'il était bien véreux. Cela ne la dérangeait pas. Elle s'en fichait comme de sa première ligne de coke. Son regarda sonda ce visage bien blanc pour cette région habituée au teint mat et au soleil qui tapait sur l'échine.

« Je n'ai pas eu mon café. C'est vexant. Et j'espère bien que cela va être réglé, au prix que je vous paye, il le faudrait bien. Dites-moi, cela ne vous empêche pas de dormir d'aider les gens comme moi ? »

Elle ne s'en souciait pas réellement, elle se contentait de poser des questions, tout simplement. Elle se pencha légèrement en avant, sachant bien qu'il voyait dans son décolleté, mais elle s'en fichait. Eliana s'en fichait d'être considérée comme un objet par les hommes car elle savait qu'elle avait du pouvoir sur eux. Ils étaient faibles, trop faibles pour tenir le coup face à la gente féminine. Elle avait été brisée par son proxénète alors qu'elle n'avait vingt ans et qu'elle était dans la fleur de l'âge. Elle en avait bavé jusqu'à ne plus pouvoir pleurer tellement elle avait souffert. Elle avait plusieurs vengeances à accomplir et les hommes étaient sur sa liste. Dans cette ville corrompue et en souffrance, toutes les mauvaises âmes se réveillaient et la tentation était immense de faire du mal.

« Vous êtes comme moi. »

Une affirmation, une si douce affirmation. Elle avait susurré cette phrase comme le serpent tentateur de l'Eden. Une lueur malsaine dans son regard. Elle n'avait que trente-six ans, mais ce milieu l'avait complètement bouffée avant de la vomir sans sommation. Elle s'était retrouvée à genoux, forcée de se relever, de devoir tuer, humilier pour s'en sortir. Elle avait souvent utilisé la magie pour nuire aux autres. Elle leur avait fait des potions qui rendaient tellement malades que vous vous croyiez mourant. Et quand on survivait, on croyait à un signe de Dieu, alors on se rependait et on partait d'ici. C'était toujours pareil. Les gens croyaient que frôler la mort était un signe pour se nettoyer des pêchés. Quelle connerie sincèrement, il n'y avait pas d'autre mot pour décrire son état d'esprit. Si Eliana avait su qu'Adam était un possédé, aurait-elle fait quelque chose ? Ce n'était pas dit. Elle n'appartenait à aucun camp, sans maître ni Dieu. Elle était libre, un électron libre qui menaçait d'exploser à la tête de quiconque qui se mettrait en travers de son chemin.

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