Back for you [Pv Sophya]

Traitez moi de maniaque si vous le voulez, mais je n'aimais pas avoir une vue d'ensemble clair de ce qui se présentait face à moi, ainsi savoir que j'avais encore quelques cartons à déballer et ne pas avoir encore trouvé le temps de le faire était déjà en soit un miracle. Un miracle qui n'allait pas tarder à s'effacer alors que j'entrepris de ranger tout ça. Et au final, il ne me fallut même pas une heure. Le pire étant que les cartons étaient remplis de livre, comment avais-je pu les oublier ? Je n'en savais rien, mais c'était chose faite à présent qu'ils trônaient dans mon étagère. Toutefois, quelque chose clochait dans l'histoire. Je n'avais pas souvenance d'avoir ne serais-ce qu'une seule fois maltraité un livre. Alors pourquoi l'un d'eux était si usé ?

Le sortant du lot, je l'observais longuement avant de comprendre qu'il n'était en réalité, pas à moi. De temps en temps, je réussissais à retrouver des affaires de Sophya. Affaire qui semblaient s'être caché pour me rappeler régulièrement qu'elle avait partagé ma vie. Sauf que jusqu'à présent, j'avais toujours mis tout ça dans un carton, repoussant la restitution à plus tard. Et j'allais recommencer lorsque je changeais brutalement d'avis. Je n'avais rien à faire de ma journée, autant en profiter non ?

Fermant le carton, je sortis de chez moi avant de prendre la direction de chez mon ex. Pressait d'en finir une nouvelle fois ? Oui et non, en fait je ne voulais plus me retrouver face à ce genre d'excuse qui ne ferait que me rappeler que j'avais fait une erreur, alors en fait autant en finir une bonne fois pour toute. Préférant marcher, j'avais mis plusieurs disaines de minutes à arriver et lorsque je fus au pied de l'immeuble, je fus heureux de croiser quelqu'un sortant de son immeuble, je n'aurais au moins pas à sonner.

Montant à son étage, je finis par poser le carton au sol avant de sonner. Profitant alors de l'attente, je réajustais mon t-shirt noir qui avait, avouons le, essayait de s'enfuir durant le trajet. Finalement pris par une certaine impatience, j'en viens à frapper énergiquement contre le panneau en bois.

« C'est Chase ! Ouvre moi ! »

Elle foutait quoi au juste ?

« Si jamais tu sors de la douche, perds pas de temps à t'habiller, je vois pas ce qu'il pourrait avoir encore à cacher ! »

Je savais que si je faisais ce genre de réflexion, il y avait de plus grande chance pour qu'elle se dépêche et donc qu'on puisse en finir. Non pas que j'avais des trucs à faire, mais voilà, comme dit précédemment, ce qui appartient au passé appartient au passé, pas la peine de ressasser.

Le téléphone vibra pour la troisième fois de la journée et Sophya se demanda combien de temps elle allait tenir avant de le balancer par la fenêtre, tout en hurlant à son interlocuteur de la fermer. Depuis la fermeture de l'orphelinat, il n'était pas rare que son ancienne tutrice ne l'appelle juste pour avoir des options supplémentaires. A vrai dire, la Médium était étonnée qu'on n'ait pas retiré directement la licence de la veille femme désormais bien trop âgée pour s'occuper de qui que ce soit, elle y compris. La jeune femme la soupçonnait même de perdre un peu la tête, alors que certaines des bribes de conversation revenait à de nombreuses reprises alors que l'appel s'allongeait.

Sa jambe s'agitait en même temps que le stylo bille qu'elle tenait en main, avant que la brune ne se décide à décrocher, tout en retenant un soupir agacé.

« Oui ? »

« Sophya ? Chérie, écoute... »

« Oh maman, c'est toi ! »

La brune souffla un bon coup, laissant la pression s'échapper de ses épaules avant de se caler confortablement dans son divan et d'éteindre la télévision. Pourtant, contrairement à son habitude, sa mère n'était pas extrêmement bavarde. Bien loin de là. Se glissant contre un coussin, prête à s'allonger pour continuer la conversation, Sophya retira ses chaussures à talons, les balançant sous la table de salon, avant de glisser ses jambes sous ses corps, et de glisser lentement vers le coussin de l'accoudoir.

« Chérie... Il est arrivé... »

La sonnerie de la porte d'entrée retentit, et la jeune femme poussa un long soupir. Était-il possible de la laisser tranquille quelques instants ?

« Attends deux minutes, je vais faire la morte, histoire qu'on croit que je ne suis pas là. »

La demoiselle écarta donc le téléphone légèrement, avant de se caler confortablement. Mais c'était sans compter l’opiniâtreté de son visiteur surprise. Ah. Chase. Et le combinet qui était loin d'être inaccessible.

« Chase ? Je pensais que tu étais au-dessus de ça.. »

Il n'allait pas partir, la jeune femme le savait bien. Elle se releva doucement alors, reportant le portable à son oreille. Sa mère non plus n'allait pas lâcher l'affaire, de ça, Sophya en était particulièrement persuadée. Passant sa main dans ses cheveux décoiffés, la brune tira légèrement sur sa robe qui était remontée avec le frottement du fauteuil, et s'approcha de la porte d'entrée.

« C'est pas ce que tu crois maman. »

« On en parlera une autre fois. J'ai quelque chose à t'annoncer. Sophya, tu sais que l'orphelinat a fermé, chérie. »

« Hmmm. »

Elle ouvrit la porte, tout en faisant signe à son ex-mari d'entrer, avant de lui montrer le téléphone. Le laissant passer devant elle, la brune reprit.

« Si c'est pour me convaincre de passer mes nuits dans des bouquins pour trouver une solution maman, je t'avertis déjà que c'est impossible. Et que je n'ai ni l'envie, ni le temps de faire ça. Laisse ça derrière nous, tu veux. »

Il lui était tout de même difficile de faire face à cet événement mais si en plus on venait le lui rappeler toutes les heures, elle n'allait vraiment pas s'en sortir. Ils ne pouvaient pas donc comprendre qu'elle ne voulait pas ressasser sans cesse la journée d'avant hier ? C'était si difficile que ça à accepter. La jeune femme leva les yeux au ciel, avant de se diriger vers la cuisine et de sortir deux tasses avant de montrer silencieusement la cafetière à Chase, pour évidemment lui faire comprendre qu'elle lui demandait s'il en voulait.

« Non So', ce n'est pas ça. C'est concernant la directrice. On l'a retrouvée chez elle... Et... »

Elle ferma les yeux un instant, sentant une légère vague de culpabilité la submerger avant de la repousser.

« Je vois. Je vais te laisser maman, je te rappelle plus tard. Je t'aime. »

Et elle raccrocha sans plus de cérémonie, avant de relever les yeux vers Chase. Bouleversée, elle l'était, c'était indéniable, mais elle tenterait de se maîtriser.

« Café ? Ou bière ? Tu es là pour quoi au fait ? Non pas que je ne sois pas contente de te voir mais... Je m'y attendais pas. Bref. »

Nerveuse ? Un peu...

Elle finit par ouvrir et je compris bien rapidement qu'elle n'était pas disponible. Oups. Le téléphone, enfin non pas oups, mais bon, je repris donc mon carton avant de rentrer comme elle me l'avait fait comprendre. Posant se dernier sur le premier meuble que je trouvais, je compris rapidement qu'il s'agissait de sa mère. Là, avec ce que j'avais dit, il y avait de grande chance pour que cette dernière commence à ce faire quelques films, mais passons. J'étais là pour lui donner et repartir.

Sauf que je me voyais mal le faire ainsi, et donc, j'allais attendre qu'elle finisse. La voyant alors me proposer du café, je refusais simplement, toujours dans mon optique de ne pas m'éterniser ici. Regardant alors rapidement l'état de l'appartement, je détaillais malgré moi les moindres détailles, comme pour voir ce qui avait changé, ou tous simplement me faire une idée de comment elle allait. Et maintenant que j'y repensais, avec les derniers évènements, ça ne devait pas être la fête. La raison de ma subite envie de venir ? Si c'était le cas alors il y avait de forte chance que mon esprit se soit dissocier de mon coeur.

Raccrochant alors, je voyais bien qu'elle n'était pas dans son état normal, après tout, j'avais suffisamment vécu avec pour savoir reconnaitre son comportement. Alors, lorsqu'elle tenta de le camoufler, je soupirais malgré moi. Je n'avais pas envie de m'éterniser, j'avais été franc sur ce point, mais il ne fallait pas non plus qu'elle agisse comme si nous étions deux étrangers. Elle essaya de me reproposer quelque chose à boire avant de me demander ce que je faisais ici, argumentant qu'elle ne s'y attendait pas.

« Je compte pas rester, donc t'embête pas. »

Désignant alors le carton je repris.

« J'ai retrouvé des affaires à toi chez moi, ça fait un moment que je dois les ramener, mais vu que j'ai encore retrouvé un truc, j'ai décidé de le faire aujourd'hui. »

Expliquais-je dans un haussement d'épaule. Souriant alors, je lui fis remarquer un détail.

« Tu sais on a été marié, je vois pas vraiment comment tu pourrais être nerveuse après m'avoir déjà vu à poil, bourré, malade ou à l'ouest… »

Nous n'avions plus 12 ans, c'était fini cette époque ou la gêne pouvait encore exister.

La brune soupira avant de s'asseoir sur une chaise haute et de suivre du regard la direction qu'il lui indiquait. Ah. D'accord. Ce n'était pas spécialement pour le plaisir de la voir, ou quelque chose dans ce goût-là. Dire qu'au fond, la jeune femme était un peu déçue était un euphémisme. Toujours était-il que Sophya n'émit pas le moindre commentaire à ce sujet et qu'elle se servit sa propre tasse avant de porter le liquide amer à ses lèvres. C'était immonde, mais ça la tenait réveillée. Dans le fond, ses pensées n'étaient pas vraiment tournées vers le moment présent, plutôt vers ce que sa mère lui avait glissé dans la conversation. Aurait-elle quand même dû lui demander plus d'explications, juste pour savoir de quoi il en retournait ? Peut-être qu'elle se faisait des films et que tout simplement le fait qu'elle n'ait plus eu d'appels était tout à fait normal ?

Ses doigts glissés autour de la tasse, elle revint alors diriger son regard vers Chase, le détaillant doucement. Le célibat lui allait bien, à lui, au moins.

« Mon bouquin de droit était chez toi ? C'est pour ça que je ne mettais plus la main dessus... »

Tout s'expliquait d'un coup... Le fait qu'elle avait dû se taper la bibliothèque de la ville un nombre de fois incalculable également. Reprenant une nouvelle gorgée, grimaçant par ce fait, la brune soupira en haussant les épaules face à sa remarque.

« Ce n'est pas toi qui me rend nerveuse, crétin. C'est juste... bref. »

Elle n'avait pas spécialement envie de se confier à lui. En même temps, à qui d'autre pourrait-elle le faire. Sa mère allait se ramener en mode « mamanboulator » les bras chargés de câlins et de la nourriture à n'en plus finir, juste parce qu'elle estimait que sa fille adorée ne se nourrissait pas comme il le fallait. James, allait probablement lui faire remarquer qu'elle s'en faisait pour rien et que la situation n'était pas de son fait, loin de là.

Pourtant les mots franchirent la barrière de ses lèvres sans qu'elle ne put les retenir.

« L'orphelinat a fermé. Et apparemment la directrice s'est... suicidée. »

Elle détourna le regard, les yeux brillants dangereusement tout à coup. Elle ne se mettrait pas à pleurer pour de telles conneries. Cette bonne femme n'avait jamais rien fait pour l'aider à part la placer chez des gens qu'aucun d'eux ne connaissaient. Certes, Sophya n'avait jamais rien eu à dire concernant sa famille d'adoption mais enfin.

« Elle m'avait demandé de l'aider à ne pas laisser les autorités fermer l'orphelinat. Je n'ai pas bougé un orteil. »

Pourtant, elle s'était présentée à la fermeture. Pourquoi ? Juste pour pouvoir tirer un trait sur cette histoire une fois pour toute. Peut-être pour s'assurer d'ailleurs qu'il fermerait. Dans le fond, Sophya n'avait aucune idée de sa présence sur les lieux. Elle avait senti devoir y aller. C'était juste ça.

« Bref, ne t'embête pas avec ça. »

« Je sais, du droit chez moi c'est pas forcement la chose la plus évidente du monde. »

Répondis-je alors qu'elle retrouvait peu-à-peu ses affaires. Toutefois, dans cette histoire et cette rencontre, je la trouvais très nerveuse. Je savais qu'elle voulait le cacher, je le sentais, mais voilà, je n'arrivais simplement pas à ignorer tout les signes et a défaut de partir comme un connard, je forçais légèrement la discussion. Selon elle, je ne la rendais pas nerveuse, la justification ne daignant pas venir tant elle me semblait tendu.

Il fut un temps j'aurais réellement insisté, mais à présent, avec elle, les choses étaient différentes, je n'avais plus mon mot à dire, nous avions divorcés. Soudain, alors que je m'apprêtais à partir, elle me parla de l'orphelinat et du suicide de sa directrice. Charmant, toujours. La voyant alors détourner les yeux, je fronçais naturellement les sourcils alors qu'elle semblait vouloir cacher ses émotions.

Reprenant alors, elle me confia que la directrice lui avait demandé de l'aider afin que l'orphelinat ne ferme pas, mais elle n'avait rien fait pour l'aider. Elle conclut par le fait qu'elle ne voulait pas m'embêter avec ça. Trop tard, c'était déjà fait, mais je n'allais pas lui reprocher.

« Tu n'allais pas vivre toute ta vie dans le passé ? »

Demandais-je simplement avant de développer.

« Tu vois, à la base aider quelqu'un ce n'est pas attendre quelque chose en échange, d'autant plus si l'aide était davantage motivé par l'argent qu'autre chose. »

Car on va pas se mentir, les orphelinats touchaient toujours lorsqu'ils placé des gosses.

« Tu n'as aucun compte à rendre. L'orphelinat a fermé ? Tant pis, mais tu n'y aies plus depuis longtemps. La directrice c'est suicidé ? Je pense que toi comme moi aurions plus de motivation à le faire. »

J'étais direct, je n'avais pas à mentir, surtout devant elle.

« Alors tu vas faire quoi ? Tu vas rester ici, à ressasser ce que tu n'as pas fait dans l'attente de quoi ? Au pire ça te hantera, mais ça, t'as l'habitude. »

Et ce n'était pas peu dire !

La brune haussa simplement les épaules, avant de détourner à nouveau le regard pour le plonger dans sa tasse de café. Inutile de préciser qu'en réalité, remuer ça ne l'aidait pas vraiment. Sophya était en quelques sortes la reine du déni, sauf quand il s'agissait de témoigner de ses sentiments concernant les faits des autres. Mais ici, c'était différent. Parce que dans le fond, la jeune femme s'en voulait un peu, malgré tout. C'était juste le temps qu'elle ne digère l'annonce à vrai dire.

Son regard se releva ensuite sur Chase alors qu'elle croisait les jambes, le regardant debout devant l'entrée. De plein fouet, elle revit le jour où il avait pris ses affaires et était parti. Depuis ce jour-là, plus aucun autre homme ne l'avait touchée, et surtout, plus aucun autre – hormis Alastair, mais l'esprit ne comptait pas vraiment en tant qu'homme – n'avait franchi le seuil de son pallier. Difficilement, la médium tenta de chasser les larmes qui lui mordaient les yeux, appliquant la morsure terrible de ces moments où elle avait l'impression que le ciel allait lui tomber littéralement sur la tête.

« Hmmmm »

Vraiment loquace Sophya, vraiment. Elle n'avait pas franchement envie de polémiquer sur le sujet. Elle finirait la soirée sous la couette, pour ne pas changer, seule.

« Je ne sais pas ce qui la motivaient. Elle n'était pas si horrible que ça, dans mes souvenirs. Là, elle était juste désespérée. »

La juriste déposa sa tasse sur la table du comptoir américain, avant de se relever et d'aller se poster dans le divan. Une chose qu'elle n'avait jamais pu contrôler, c'était sa bougeotte aiguë. Dès l'enfance, même si elle était occupée à lire, la jeune femme avait toujours du changer de pièce ou au minimum de position pour pouvoir continuer son activité, signe d'un certain trouble d'hyperactivité. Si elle préférait les activités intellectuelles, il n'en restait pas moins que son corps avait un besoin constant de mouvement. Et puis, ce n'était pas comme si son ex mari n'était pas habitué à cela.

« Qu'est-ce que tu veux que je fasse, Chase ? J'en sais rien ! Strictement rien. »

Elle se laissa tomber dans le divan avant de se prendre la tête dans les mains. Peu importait les stratagèmes, les sensations remontaient tout de même, et sa gorge commençait à la brûler, signe que
ses larmes ne tarderaient pas à arriver. Et la dernière chose que la spécialiste voulait faire, c'était bien commencer à pleurer devant lui.

« J'ai merdé. C'est inutile de dire le contraire, j'ai merdé. Je ne suis pas responsable de sa mort, je le sais, mais il n'empêche... J'ai ressenti cette joie malsaine à l'idée que cet orphelinat ferme. Juste parce que moi, j'y ai passé de mauvais moments. Pourtant... C'était sa vie. Et je n'ai même pas bougé pour tenter de l'aider à la récupérer. »

C'est à ce moment que la demoiselle se rendit compte de combien elle s'en voulait. Sophya était loin de ne pas avoir de coeur. Juste qu'elle voulait l'enterrer profondément sous des attitudes de grande dame, pour éviter qu'on la perce à jour. Pour éviter d'avoir à souffrir à nouveau.

« Mais soit. Je ne veux pas penser à ça. Je n'ai pas le droit de le faire. »

Elle avait toujours été extrêmement dure avec elle-même, s'empêchant de craquer sous une quelconque pression. Le lycée, les cours,... Tout cela avait toujours fonctionné différemment dans sa tête.

« Ça marche comment ta petite affaire ? »

Je l'écoutais, je ne faisais que l'écouter et la regarder bouger. Comme d'habitude, lorsque quelque chose la touché, elle ne savait plus comment réagir et elle faisait que camoufler, cacher ce qui était pourtant évident. Elle avait été atteinte, plus qu'elle ne l'aurait du. En fait, j'avais l'impression d'avoir beaucoup de chance de savoir prendre du recul, de ne pas réagir à chaud et de pouvoir me donner le temps. J'étais exigent avec moi-même, mais j'acceptais et reconnaissais mes faiblesses. Les seules choses que je n'acceptais pas été bel et bien des erreurs que j'aurais pu éviter mais que j'avais refusé d'envisagé.

C'était le contraire pour elle. Trop exigeante, ne se pardonnant rien par peur d'y perdre quelque chose. Le problème étant qu'elle évitait les conflits et que donc, ça ne faisait qu'empirer. Alors, qu'elle s'en veuille maintenant c'était bien, mais inutile, il aurait fallu agir avant.

« T'as merdé, ou pas. Ce n'était pas à toi seule d'agir. »

Soupirant un instant, je posais mon regard sur elle avant de dire.

« Tu sais ce qui a fait que notre mariage n'a pas tenu ? Le fait qu'à chaque fois qu'on s'engueulait c'était pour des problèmes graves poussé à l'extrême. Et tu veux savoir pourquoi ? Car tu as toujours été tellement exigeante avec toi même que tu n'arrivais pas t'exprimer quand il fallait. »

Franc, comme toujours.

« Tu attends qu'il soit trop tard pour te décidé… Le nombre de fois ou tu aurais dû m'engueuler car je te prenais le choux avec mon rangement. Mais non, tu ne voulais pas céder, du coup tu ne disais rien et à chaque fois, c'était des engueulades qui ne finissaient pas en réconciliation. Tu es entrain de faire pareil là. »

M'approchant alors, je repris.

« Là on s'en fout de mon affaire Sophya. Moi je te le dis, tu n'avais rien à prouver, rien à rendre. Tu aurais pu, mais tu n'étais pas la seule à pouvoir le faire. Alors si tu dois craquer, fais le maintenant pour une fois. Sinon ca va encore empirer et tu seras malheureuse une nouvelle fois. »

Finissant mon avancé. Je m'étais agenouiller, cherchant son regard.

Peut-être. Surement d'ailleurs que le brun avait raison, mais Sophya ne parvenait pas à se l'avouer. La vérité c'était que dans le fond, elle se sentait mal d'avoir refusé. Et que de savoir que la vieille femme s'était suicidée, que des pensées aussi malsaines que méchantes avaient alors traversé sa propre tête, ne l'enchantait pas vraiment. Jamais, elle n'avait vraiment souhaité de mal à quelqu'un, peu importait les moqueries, et le mal que d'autres pouvaient lui faire. Ses mains s'accrochèrent désespérément à ces quelques mèches de cheveux, tandis que son regard restait obstinément cloîtré au sol.

Il lui avait toujours été difficile de voir les défauts des autres, bien trop habituée à être le problème. Du mois, c'est toujours ce que la jeune femme avait crû durant toute son enfance. Anormale, pas comme les autres, voyant des choses qui n'existaient pas. Avant d'avoir la certitude que si, et qu'en réalité c'était les autres, qui différaient d'elle. La prise de conscience avait été lente, douloureuse et s'était faite au fur et à mesure de l'avancée de son parcours. D'ailleurs sa rencontre avec Chase avait été une aide de ce côté-là. Sensiblement pareils, ils avaient pu trouver en l'autre un miroir, du moins dans cet aspect.

Lorsqu'il parla de leur mariage, la jeune femme ne put s'empêcher de lui retourner un regard blessé. C'était donc ainsi qu'il voyait les choses ? Sophya poussa un profond soupir, avant de lui rétorquer, lèvres tremblantes et yeux de plus en plus humides.

« Non, ce n'est pas ça. C'est le fait que nous nous soyons sentis obligés de nous marier pour satisfaire les uns et les autres, sans penser à ce que nous deux, nous voulions Chase. Nous n'avons pas choisi de nous lier à vie, nous y avons été contraints. Et c'est ça qui nous a condamné d'avance. Parce que si maintenant tu me le redemandais, de ta propre volonté et pas de celle de nos parents, je peux te jure que je dirais oui, cent fois oui. »

La brune avait parlé d'une voix étranglée par les larmes. Son regard s'échappa alors de la vue du photographe avant qu'elle ne délaisse ses cheveux pour ses bras, une larme traîtresse roulant sur sa joue. Un rire, paradoxal, franchit doucement ses lèvres, durant quelques instants. Ces choses-là ne l'avaient jamais vraiment énervée. Le fond du problème avait toujours été cette présence étouffante des choix des autres dans leur couple, comme s'ils ne s'appartenaient plus. Et les petits défauts du quotidien avaient fini par prendre une importance qu'il n'y aurait pas dû avoir alors.

Baissant les armes, la jeune femme se mit à trembloter légèrement, les larmes dévalant ses joues pâles. Ses yeux s'accrochèrent à ceux de Chase avant qu'elle ne souffle.

« Peut-être. Mais ce que j'ai fait... ou plutôt pas fait... Ce n'était pas correct. Pour une autre personne, je l'aurais fait. »

Ses lèvres tremblèrent à nouveau et la brunette renifla doucement.

« Je n'étais pas malheureuse. Pas avec toi. Pas à cause de toi. Mais à cause d'eux. »

Les yeux noisettes étincelèrent à nouveau, avant qu'elle ne les ferme pour laisser glisser les larmes réparatrices sur ses joues.

« Qu'est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ? Pour que je ne sois pas capable de parler de ça, de faire face à ça ? »

La voix s'était faite douce, tendue, prête à craquer au moindre instant, un peu comme elle se sentait dans l'immédiat.

Nous n'étions pas d'accord sur ce qui avait causé la fin de notre mariage. Pour elle, tout cela était entièrement imputable au fait que nous nous étions senti obligé de le faire et ce pour les autres et non pour nous. Sauf que contrairement à elle, j'étais certain qu'il n'avait pas fallu grand chose pour que toute motivation nous quitte et que quelques efforts auraient pu nous faire remonter la pente. Elle conclut en disant que si aujourd'hui, je le redemandais de moi-même, elle dirait oui. Elle ne s'en était pas remise n'est-ce pas ? Si je devais avouer avoir du mal à me faire parfois à son absence, j'avais refusé de regarder derrière moi. Avançant, filant droit.

« Pas uniquement Sophya… Contraint peut-être, mais on a surtout abandonné avant la fin. »

Soupirant alors, je repris, répondant presque à sa dernière phrase.

« Et je confirme, à fort de ne rien exprimer, tu as perdu des occasions. Si tu m'avais demandé de te demander en mariage de mon propre chef, j'aurais divorcé il y a bien longtemps et aujourd'hui, la situation ne serait pas la même. »

Elle pleurait, je l'avais senti, et je finis par le voir. N'exprimant rien, je me contentais de la regarder dire que son inaction était incorrect. Je n'étais pas du même avis pour ma part, réellement pas. Ce qui changer vous allez me dire. Mais voilà, elle s'acculait d'échec dont elle n'était pas responsable.

« Les rôles auraient été inversé, tu aurais eu besoin d'aide qu'aurait-elle dit ? Que tu n'étais pas la seule dont elle devait s'occuper et qu'elle avait d'autre chat à fouetter. »

Elle n'aurait pas mieux agit que Sophya. Elle reprit alors en disant qu'elle n'avait pas été malheureuse. Pas avec moi, pas à cause de moi, mais à cause d'eux. La regardant alors, je sentais qu'elle ne mentait, je savais qu'elle ne se camouflait pas. Elle était sincère. Ne répondant pas, je l'écoutais s'interroger sur ce qui ne tournait pas rond chez elle. Pourquoi n'était-elle pas capable d'en parler, de faire face.

« Car t'as toujours trop attendu de toi et des autres et qu'au final, tu te retrouves dans des situations plus douloureuse que jamais. »

Elle était face à moi pourtant elle semblait bien loin. Glissant alors une main sur sa joue, j'effaçais une larme avant de lui dire d'une voix plus calme, plus douce.

« Arrêtes de regarder derrière toi Sophya, il n'y a rien que tu pourras y trouver pour t'aider à avancer. »

La brune souffla doucement, tentant de chasser les larmes traîtresses qui avaient fini par inonder son visage. Ils avaient toujours appréhendé les choses différemment, avec une vision qui leur était propre. Jamais, elle n'avait été une artiste, ne voyant que ce que le monde pouvait lui offrir de direct. Son don avait été la chose la plus effrayante qu'elle n'eut jamais connu, la chose qui l'avait rendue tellement... elle, dans le fond. D'apparence forte et sure d'elle, alors que dans le fond, elle ne rêvait que de s'enterrer loin de tous, ne laissant personne l'approcher réellement. Peut-être qu'il avait raison, que sur la fin, elle avait instauré une distance entre elle et lui, inconsciemment.

« On ne pouvait pas vivre dans l'ombre des autres, Chase. Dans l'histoire, on a voulu blesser personne, mais nous, on ne nous a pas épargné. »

Les yeux couleur caramel se fixèrent dans les yeux bleus du jeune homme avant qu'elle ne lève gentiment les yeux au ciel. Pas d'exaspération, ni pleine de remords, mais plutôt parce que l'idée relevait de l'absurde. Et que l'absurde et Sophya, ça faisait deux.

« Divorcer, se remarier dans l'heure ? Ça n'aurait rien arrangé Chase. Je ne voulais pas de ce mariage à la base. Je te voulais toi. Et si je devais être complètement honnête, je ne veux toujours que toi. L'intérêt de ce mariage, c'était d'éviter les situations gênantes et les commentaires désagréables aux repas de famille. Au final, ça nous aura juste bousillé nous. Est-ce que tu aurais voulu m'épouser si on ne l'avait pas autant imposé ? Est-ce que tu aurais voulu qu'on se marie à l'âge qu'on avait ? »

Elle n'avait que vingt et un an, alors qu'ils se passaient la corde au cou. Et si cela n'avait pas été une question de maturité, il n'empêchait qu'elle était beaucoup trop jeune. S'ils s'étaient laissés plus de temps, son avis aurait été différent et elle ne doutait pas que leur mariage aurait tenu.

« Je sais. Je sais tout ça. Et je sais aussi que me fustiger pour ça, ça relève de la connerie pure. C'est juste trop récent. »

Son regard devint plus vague, plus embué.

« C'est juste qu'aller là-bas a été la plus grande erreur de toute ma vie. Je me suis trop impliquée, à la base. Je n'étais pas aussi détachée que je le pensais, et je n'aurais jamais du remettre les pieds dans ce fichu orphelinat. »

Un rire sans joie la secoua à sa remarque. Exigeante. Oui, ça elle l'était. Curieusement, il était le seul dont elle n'avait jamais rien attendu de plus que ce qu'il lui donnait. Parce que ça lui suffisait, parce qu'elle était amoureuse. Peut-être était-ce ça dans le fond qui lui avait fait défaut, pour apprendre à l'aimer davantage, à le découvrir sous des aspects bien différents. Pourtant Sophya ne répliqua pas à cela. Parce que c'était vrai, et que parler pour ne rien dire, ce n'était pas utile.

« Je n'ai pas l'habitude de le faire. C'est juste... tellement soudain. Comme si tout ça essayait de me rattraper. Je veux pas me laisser atteindre, j'ai assez donné avec ces conneries. »

Enfant, elle avait souffert d'être une gamine abandonnée. De ne pas savoir qui on était dans le fond. La couleur des yeux de sa mère, le prénom de son père. Mais ça s'était volatisé quand Stephen et Maria Turner avaient débarqué dans sa vie. Quand ils étaient passés au-dessus des préjugés des autres et qu'ils avaient voulu de l'enfant silencieuse et peureuse. Cette enfant qu'ils avaient transformé à l'aide d'affection et de beaucoup de patience, en une jeune femme décidée et volontaire. A qui, malheureusement, il arrivait d'avoir des passes plus vides.

« Arrêter de regarder derrière moi, signifierait faire une croix sur toi, Chase. Et ça, j'y arriverais pas. Tu pourrais me le demander, je le respecterais. Ça ne signifierait pas que je ne penserais pas à toi ou que du jour au lendemain tu ne compteras plus pour moi. C'est impossible. Totalement impossible.»

« Et après c'est moi le défaitiste ? »

Demandais-je alors qu'elle ne donnait aucun crédit à notre mariage. Certes, je n'en avais pas donné beaucoup plus, mais disons que j'avais eu le mérite de ne pas le considérer entièrement comme nul. Il y avait eu des choses, j'en avais appris plus sur moi, mais surtout j'avais appris à ne plus me préoccuper de bonheur des autres si celui-ci me condamné à être moi même un autre. Quoi qu'il en soit, Sophya avait sans doute bien des tords dans l'histoire et je lui reprochais surtout de n'avoir jamais su s'exprimer le temps voulu, de ne jamais avoir confié ses doutes et ses envies. Ainsi, il fut un temps ou j'aurais pu accepter le divorce pour l'épouser, mais cette époque était fini. Tous ce que nous aurions pu créer de nous même avait disparue.

Pour elle, cela n'aurait rien arrangé, nous ne voulions pas de se mariage mais nous voulions de l'autre. Et elle semblait encore me vouloir alors que moi, j'avais décidé d'avancer. Nous avions fait ça pour nos familles et je savais très bien ce que cela nous avait couté. Notre mariage. Elle me demanda alors si je l'aurais épousé de moi même. Mais surtout si je l'aurais fait à cet âge. Secouant légèrement la tête, je répondis sincèrement.

« Je ne t'aurais pas épousé, et surtout pas à cet âge. En revanche, je me prononce en ayant vécu cet échec et cette frustration, si cela se trouve, peut-être que les choses auraient été différentes. »

Peut-être, mais c'était avec des si que l'on reconstruisait un monde et je n'avais aucun intérêt à reconstruire le mien sous peine de courir après le passé. Mais notre mariage n'était pas le sujet, le sujet c'était sa manie à vouloir toujours tous cacher et j'essayais de lui faire comprendre que si elle se sentais responsable, alors elle ne serait pas la seule à l'être. Beaucoup n'avaient pas réagit. Elle ajouta alors qu'elle avait fait l'erreur de retourner la-bas. Et elle avait ressentit de plein fouet la culpabilité qu'elle croyait endormie.

« Arrêtes Sophya. »

Glissant alors une main sur sa joue, j'effaçais une larme avant de lui dire de regarder devant elle, de ne pas chercher à vivre dans le passée. Elle me répondit alors que cela voudrait dire faire une croix sur moi. Et elle n'y arriverait pas. Elle ne pouvait pas oublier, c'était impossible d'après elle.

« Tu es extrémiste tu le sais ? J'ai tiré un trait sur notre mariage, mais je ne le renie pas. Il a existé, mais c'est du passé. Aujourd'hui j'avance, et j'avance en te savant là, certes tu n'es plus ma femme, mais je peux regarder dans le futur sans devoir te supprimer. »

Elle devait se créer de nouveau souvenir, comme moi.

« Défais toi de tout ce qui t'encombre Sophya, tu a le droit d'avancer. Sinon, tu vas faire quoi ? Vivre dans la douleur de notre séparation et dans les remords qui sont né de cette disparition. »

La forçant à me regarder, je dis d'une voix un peu plus ferme.

« Tu dois avancer, tu comprends, tu es obligé Sophya. Faire une pause, regarder derrière toi, c'est prendre le risque de ne plus penser qu'à ça. Alors avance ! . »

Sophya étira un léger sourire devant sa réflexion. Elle n'était pas défaitiste juste... oui juste défaitiste, d'accord, il avait raison. Peut-être parce qu'à ce jour, Chase avait été la seule relation dans laquelle elle s'était investie, vraiment, sans avoir peur de ce que le lendemain lui réservait. Peut-être que ça ne les avait pas aidé, en effet.

« Il faut bien que tu aies un peu déteint sur moi. Et si tu veux savoir, je trie même les serviettes de bain par ordre de couleurs et de tailles maintenant. Encore un truc que tu m'as laissé.»

Oh, elle se moquait un peu, mais rien de bien méchant. C'était sa manière de dédramatiser la situation, sa façon de passer au-dessus de ses petits problèmes. Et d'un côté, ce n'était pas un mensonge. Depuis qu'elle connaissait Chase, certaines manières de leur vie commune s'étaient glissées dans sa façon d'être et de s'organiser. Même son petit déjeuner elle ne le prenait plus de la même manière.

Ils glissaient vers un sujet de conversation plutôt dangereux, la brune en étant parfaitement consciente alors. Leurs points de vue divergeaient mais dans le fond, leur but avait été commun auparavant. Peut-être s'était-elle trop mise de côté, et que les choses auraient pu être vraiment différentes aujourd'hui. Mais est-ce que ce n'était pas rattrapable ? Aux yeux de la brune, bien entendu que ça l'était. Mais étaient-ils prêts à refaire un bond dans le passé pour pouvoir avancer ? Peut-être que non. Ce n'était pas son cas. Ses pensées se faisaient plus confuses et la jeune femme ne put s'empêcher de sentir ses yeux se remouiller à force de penser. Bon dieu, cette guimauve dans son comportement c'était tellement peu elle... tellement quelqu'un d'autre. De nouvelles larmes roulèrent sur ses joues alors que la demoiselle tentait d'échapper à l'emprise du regard de son ex-mari.

Pourtant, elle l'écoutait quand il lui parlait et ne pouvait nier qu'il avait raison d'une certaine manière. Mais c'était tellement plus facile à dire qu'à faire, sauf quand on s'appelait Chase Evans. Un petit rire sans joie l'anima à nouveau et la juriste finit par le laisser attraper son regard vert dans le sien, bleu, avant de lui répondre d'une petite voix.

« C'était si facile de te faire entrer, que de te faire sortir, d'une certaine manière, est plus difficile. Je ne sais pas comment faire. »

Elle se dégagea doucement, fuyant à nouveau son regard avant de se relever et de commencer à faire les cents pas.

« Je ne sais pas faire sans regarder derrière moi Chase. Pas quand ça te concerne. Je vis dans l'appartement qu'on a choisi, ensemble. Je peux te lister tous les endroits où on a fait l'amour, où on s'est engueulés. La vérité c'est que quel que soit l'endroit où je regarde, ça me ramène à toi. Alors comment veux-tu diable que je passe au-dessus de cette histoire ? »

Sophya s'arrêta une seconde, le regardant fixement, reprenant durement.

« Je n'ai pas les moyens de déménager, soyons honnêtes, notre loyer ici était ridiculement médiocre pour le quartier. C'est essentiellement ce qui nous a motivé à le prendre, cet appart'. Et je n'en ai pas spécialement l'envie non plus. J'aime ce qu'il dégage. »

Elle souffla lentement, avant de continuer plus doucement.

« Je ne sais pas comment m'y prendre, parce que je ne m'y suis jamais pris autrement. Oui, je suis extrémiste, mais ça a toujours été tout ou rien dans ma vie. Les demies mesures, je ne connais pas. Et puis, tu n'es pas une obsession non plus. Heureusement, parce qu'alors j'irais consulter un psy illico.»

Nouveau rire, nouvel haussement d'épaule. Dédramatiser. Toujours.

Certes j'avais sans doute déteint sur elle, mais ce n'était pas vraiment plus mal sur certain point. Mais passons, nous avions d'autre sujet à traiter et je devais lui faire comprendre une bonne fois pour toute qu'elle n'avait pas à agir ainsi. Elle n'était pas responsable, elle devait le comprendre. Mais elle était borné et refusé de faire une croix sur le passé, argumentant d'ailleurs par le fait que cela impliquerait faire une croix sur moi, je lui assurais qu'elle pouvait regarder devant elle sans craindre que je ne disparaisse, car bien que je ne sois plus réellement en mesure de refaire la même erreur, je n'irais pas jusqu'à l'abandonner.

Elle ne savait pas comment me faire sortir de sa vie. Elle ne savait pas comment ou ne voulait pas ? J'eus plus ou moins la réponse lorsqu'elle se releva pour aller faire les cents pas. Elle avait toujours la bougeotte c'est vraiment violent. Elle ne savait pas ne pas regarder derrière elle, d'autant plus quand j'étais dans l'équation, qu'elle m'efface, je ne mourrais pas. Elle ajouta alors qu'elle vivait dans notre ancien appartement, on l'avait choisi ensemble et elle pouvait d'ailleurs me lister tout les endroits ou nous avions fait l'amour, ou, tous les endroits ou nous nous étions engueulés… Sophya ne vivait absolument pas dans le passé, vraiment pas !

Pour elle, en vivant ici elle ne pourrait pas m'oublier… Elle se cherchait plus d'excuse que de solution. Elle n'avait pas les moyens de déménager, l'avantage d'ici étant le loyer, quoi qu'elle ajouta aussi qu'elle n'avait pas envie de bouger. Elle ne s'aidait pas.

Soupirant alors, je devais avouer que je ne comprenais pas comment quelqu'un comme elle pouvait à se point s'aveugler, je dirais même que si je n'avais pas eu une certaine affection pour elle, j'aurais sans doute laché l'affaire. Mais c'était Sophya, ça changeait tout. Tout ou rien, une vision des choses assez spéciale, bien que dans le fond, je n'acceptais les concession que lorsqu'elles étaient équitable, et ne risquaient pas de me détruire, pas comme le mariage.

Elle finit alors sur une blague qui je pense avait pour objectif de dédramatiser, mais ça ne prit pas avec moi. Elle ne détournerait pas mon attention, pas aujourd'hui.

« T'es réellement paradoxal Sophya. »

Me redressant, je contournais le canapé avant de m'appuyer contre le dossier et de croisé les bras.

« Tout ou rien ? Alors pourquoi garder un appartement qui maintient des souvenirs, sans en créer des nouveaux ? »

J'étais sérieux, bien que les comparaisons que j'allais utiliser étaient elles, déjà moins adulte.

« Notre relation n'est pas un dinosaure, elle va pas finir dans les reliques du monde, demeurant un éternel mystère et n'étant jamais oublié. On va pas étudier éternellement notre couple. »

Soupirant un instant je repris.

« Tous ou rien… Ok, alors sors moi de ta vie ou recouple nos vie, mais arrête de faire semblant en n'utilisant que des demi-mesures. »

Je n'étais pas toujours tendre, mais elle n'était pas logique.

« Si tu continues à reculer comme ça, crois moi, tu devras consulter réellement un psy, je pense même que tu devrais envisager de te faire aider, car si tu ne m'écoutes pas, peut-être que tu en écoutera d'autre et qu'un jour, tu réussiras à arrêter de regretter chacun de tes choix. »

Elle ne pouvait pas vivre ainsi.

C'était vraiment difficile pour Sophya de rester en place alors qu'elle se faisait presque engueuler par Chase. Et quoi ? Il allait finir par la tirer par la main, juste parce que monsieur jugeait qu'elle avait besoin d'aide pour... quoi au juste ? En quoi ça le regardait encore ce qu'elle pouvait bien penser ou faire de sa vie, vu qu'apparemment un divorce et hop, plus de sentiments ? C'était vraiment stupide... Chase comme ses parents oubliaient qu'elle était une gamine qui avait grandi onze ans dans un orphelinat où personne n'avait jamais voulu d'elle. La médium était partie de là sans se retourner, sans un regard en arrière, traçant une croix définitive sur ce passé qu'elle voulait réellement enterrer. Son adoption avait été la ligne de départ de sa vie, et elle n'avait parlé qu'à de très rares occasions de ce qu'il s'était passé à l'orphelinat, et pouvait d'ailleurs compter sur les doigts d'une main le nombre de fois où elle l'avait fait. Pourtant, cela avait régi une grande partie de sa façon d'être. Cela expliquait pourquoi elle faisait un rangement intensif deux fois par semaine, ne laissait rien traîner au sol ou dans la salle de bain – réflexe pour éviter qu'on ne vous pique vos affaires à coup sûr – qu'à onze heures précises toutes les lumières de son appartement étaient éteintes, que chacun de ses vêtements étaient rangés de manière bien spécifique et que pas mal de ses affaires avaient au moins ses initiales inscrites dessus. Pourtant, la jeune femme avait bien tenté d'endiguer tout ça mais n'y était tout simplement pas parvenue. Alors elle avait fait une croix définitive, n'expliquant à personne d'où ces tocs lui venaient, faisant avec comme si c'était quelque chose de naturel. Elle n'avait jamais mentionné l'orphelinat, n'avait même jamais salué l'une de ses anciennes camarades qu'elle avait pu croisé en ville, détournant pudiquement le regard et faisant comme si tout cela n'était que l'inconnu. Parce que quand Sophya décidait de quitter quelque chose, c'était pour de bon.

Elle ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel, avant de mettre ses mains sur ses hanches, prévoyant déjà la suite de la conversation comme quelque chose de barbant mais surtout comme quelque chose qui n'allait pas du tout lui plaire. Paradoxale ? Non, pas vraiment. Elle avait juste des opinions arrêtées, qui parfois, certes, entraient en contradiction, mais ce n'était pas pour autant qu'elle était paradoxale. De son point de vue, Chase l'était bien plus qu'elle d'ailleurs. Parce que pour quelqu'un qui avançait, il lui semblait bien attaché à lui faire changer d'opinion.

« Je n'ai pas les moyens de déménager. Ce n'est pas parce que je bosse pour un avocat que j'ai le même salaire que lui. Tu devrais être bien placé pour le savoir on a partagé le même compte en banque... »

L'argument était totalement valable, vu qu'extrêmement vrai. Un soupir exaspéré sortit de ses lèvres alors que la brune dardait un regard qui tournait lentement vers l'énervement. S'il avait voulu des disputes auparavant, il allait gagner pour le coup. Sarcastique, Sophya ne put s'empêcher de lancer d'un ton mordant.

« Tu as regardé Jurassic Park pour sortir des références pareilles ? Je n'ai jamais prétendu ce que tu viens de déclarer Chase. »

Elle croisa les bras à son tour, se dressant face à lui, séparée de quelques pas seulement. Son regard flamboya un instant avant qu'elle ne siffle.

« C'est toi qui veut t'éjecter, bon sang ! Je n'ai jamais demandé ça... Recoupler nos vies ? Comment ? Quand tu balances à tue-tête que tu n'en as plus rien à faire de moi, que je peux rester la bonne copine dans ta vie. On a été mariés pendant quatre ans Chase, on ne peut pas rester bon potes. Y'a pas d'enfants pour nous forcer à nous voir, le divorce est prononcé. S'il me reste des sentiments, ce n'est pas ton cas apparemment, alors qu'est-ce que tu veux que moi, je fasse ? C'est de ton côté que ce n'est pas clair... »

Pourtant ce qui suivit la cloua sur place, avec autant de force que s'il l'avait gifflée. Son regard se durcit et la jeune femme recula de quelques pas, avant de plisser les yeux sans ajouter un mot, se contentant de le fixer. Waw, c'était violent ça. Peut-être trop. Elle laissa filer quelques secondes, qui lui parurent comme une éternité avant de glisser froidement.

« D'accord. Donc maintenant j'ai un problème. Classe. Vraiment. Et quoi ? La prochaine chose sympa que tu vas me sortir ça va être quoi ? Vas-y je t'écoute attentivement, monsieur le donneur de leçon. »

« Je sais, mais y'a des solutions, moi je me suis excentré et j'ai trouvé, c'est sur que si tu veux rester dans le quartier tu auras du mal à trouver. »

Il y avait des solutions, il fallait juste qu'elle cesse de les refuser. Mais passons, j'avais l'impression de me battre contre elle, de me battre inutilement. J'avais surtout l'impression de me battre pour rien et contre rien. Elle n'écouterait pas, je le savais assez pour m'être plus d'une fois engueuler avec elle. Mais voilà, j'essayais toujours, en vain. Elle me rétorqua alors qu'elle ne prétendait pas ce que je disais, je pensais malheureusement le contraire.

« Figures toi que oui… Tu savais qu'il était ressorti en 3D ? »

Elle commençait à perdre patience, je le voyais. Ainsi donc elle siffla que je cherchais à m'éjecter seul. Elle ne voyait pas comment me garder pleinement alors que je cherchais sans cesse à dissocier nos vies. Quatre ans de mariage et aucune évolution dans le fond. Et pour elle, j'étais celui qui n'était pas le plus clair des deux. Possible, ou non, j'étais celui qui avait décidé en premier et qu'elle n'arrivait pas à comprendre.

« Je veux que tu prennes une décision. »

J'étais claire et assez concis pour le coup. Je voulais juste qu'elle prenne une décision, qu'elle agisse. C'était fou comme le sujet avait dévié d'un coup. Alors voilà, j'en étais arrivé à la conclusion qu'elle devrait peut-être se faire aider si elle refusait mon aide, quelqu'un d'autre pourrait peut-être y arriver, quelqu'un n'ayant pas mon passif avec elle. Elle prit visiblement la mouche, attendant maintenant la suite. Soupirant, je levais les yeux au ciel avant de me détacher de son canapé et de passer à côté d'elle en me dirigeant vers la porte.

« J'essaie, j'essaie sincèrement de t'aider, mais ça sert à rien. »

M'arrêtant à quelques pas de la porte, je me retournais vers elle avant de reprendre, calme, presque fatigué par ça.

« Je pense que le plus simple sera que je ne passe plus, je t'enverrais par la poste les affaires que je retrouverais à l'avenir. »

Ouvrant la porte, je n'avais pas envie de partir sans l'aider à aller mieux, mais je ne faisais qu'empirer les choses, je ne pouvais pas l'aider.

« J'espère sincèrement qu'un jours tu comprendras. »

Comprendre quoi ? Qu'elle ne devait plus regarder derrière elle.

Elle ne prit même pas la peine de répliquer. Quand son humeur devenait si ombrageuse, Sophya savait pertinemment que la seule chose à faire était de garder le silence et d'attendre que son orage passe. En général, la brune s'allumait aussi vite qu'elle s'éteignait et très certainement que ce serait le cas encore une fois. Se taire, observer et écouter l'aidait également à ne pas commencer à s'énerver pour un rien. On lui reprochait d'être passive, elle se targuait uniquement d'être attentive. Pour la médium, les deux choses étaient extrêmement différentes, quoique les gens puissent en dire. Pourtant, la jeune femme ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel devant sa tentative d'humour – qu'elle savait ne pas en être une, alors qu'elle même venait de le cingler d'une remarque agacée. C'était ça aussi le problème entre eux. Ils n'arrivaient à rien prendre au sérieux dans le fond. Et c'était plutôt dérangeant, il fallait l'avouer.

Bras croisés, la juriste l'observait d'un oeil furieux, alors qu'il semblait encore être avide de leçons en tout genre. Et quoi ? Il voulait l'aider. L'aider à quoi, quand quelques secondes avant il lui demandait de prendre une décision. Bon sang. Que voulait-il lui, au juste ? C'était ça, la vraie question. Elle l'observa se redresser et partir, le suivit du regard, un pincement au coeur. Peut-être y avait-elle été trop fort, comme d'habitude. L'impression d'avoir une pierre tombant dans son estomac se fit sentir, alors qu'il lui expliqua que dorénavant, il laisserait ses affaires arriver par la poste. Et en le voyant ouvrir la porte, la jeune femme prit conscience d'une chose. Soit elle laissait leur vie se transformer en ce chaos qui semblait se créer en cet instant, soit elle se décidait une bonne fois pour toute à se bouger.

Comprendre quoi ? C'était ça justement qu'elle n'arrivait pas à percevoir. Ce qu'il attendait d'elle... Ce qu'elle attendait de lui.

C'était un instant décisif et Sophya en était parfaitement consciente. Qu'est-ce qu'elle allait faire ? Le laisser partir, se morfondre dans leur dispute ou pour une fois, prendre les devants ? Ses yeux verts suivirent du regard le départ du photographe tandis que ses pensées se bousculaient dans sa tête. Que faire ? Comment réagir ? Et à elle de rester plantée là, comme si son corps ne parvenait plus à bouger, et comme si son esprit s'était mis en veille. La brune refusait de pleurer, de laisser les émotions la submerger. Tout ce qu'elle savait c'est qu'il venait de mettre un frein définitif à leur relation... Alors que dans le fond, rien ne l'y obligeait. Sauf si lui en avait envie, ce n'était pas ce qu'elle voulait. Et avant qu'il ne passe définitivement la porte, ses lèvres s'actionnèrent enfin et son cerveau se remit en marche.

« Chase. Attends. »

Elle décroisa les bras et se remit en marche, dans sa direction. Rapidement, elle se rapprocha de lui, avant de se placer à quelques pas devant lui. Peu lui importaient ce que les gens pensaient ou disaient, Sophya s'en moquait complètement.

« J'ai fait l'erreur une fois de ne pas te retenir. Je ne la ferais pas une deuxième. Ce n'est pas parce qu'un bout de papier dit que nous ne sommes plus mariés, que cela va forcément compter pour moi. Je ne t'ai pas retenu, parce que j'avais l'impression qu'il n'y avait plus rien à sauver. Mais... Si ce n'était pas le cas, alors toi, tu n'aurais pas essayé. »

A nouveau, elle se rapprocha, lui laissant le choix de se dérober ou non, relevant son visage vers le sien, plantant son regard dans le sien.

« Il y a tout à sauver. Tout. Il n'y a pas de passé, il n'y a que maintenant. C'est pour ça que je n'ai pas à regretter de regarder en arrière. Parce qu'il n'y en a pas encore pour moi. Rien ne s'est arrêté à un stupide bout de papier. »

Elle se rapprocha encore, ses yeux verts lavés de toute colère.

« Si tu veux vraiment tout arrêter, alors dis-moi que tu ne ressens strictement plus rien quand je suis là. Et que tu m'empêcheras de faire ce que je m'apprête à faire. Tu peux toi, choisir. De reculer et de tout mettre au passé, ou de continuer ce qui a été mis en pause, parce que je n'ai pas eu le courage de te dire ça avant. Parce que j'ai été suffisamment stupide pour laisser un papier décider de ce que je ressentais. J'ai choisi.»

Je savais reconnaitre une situation qui n'avancerait pas et en cet instant, j'étais face à un mur. Alors je pris la décision de partir, de m'éviter bien des ennuies en partant d'ici. Mais avant que je ne puisse passer le pas de la porte, elle me demanda d'attendre. M'arrêtant alors, je la regardais un peu intrigué avant d'avoir une réponse. Elle était proche, et ce qu'elle me dit me fit légèrement froncer les sourcils. Elle avait fait l'erreur de ne pas me retenir une fois. Elle ne voulait pas le faire une seconde fois. Le divorce, le fait qu'il soit prononcé n'avait pas d'importance à ses yeux. Elle me confia alors qu'elle n'avait pas chercher à me retenir, car elle avait longtemps pensé que nous n'avions plus rien, mais avec le recule, ce n'était peut-être pas le cas. Et je n'aurais pas essayé. Elle essayait de faire quoi là ?

Elle s'approcha à nouveau alors que je n'avais pas briser le voeu de silence que j'avais prononcé dès qu'elle m'avait retenu. Il y avait tout à sauver pour elle… C'était quoi ce discours ? Ou voulait-elle réellement en venir ? Elle refusait définitivement de tourner la page à mes yeux, alors pourquoi moi, je restais là, silencieux, ne la détrompant pas alors qu'elle s'avançait encore un peu plus vers moi. Elle me dit alors que si je voulais réellement tout arrêter, je n'aurais qu'à dire que je ne ressentais plus rien pour elle lorsqu'elle était là. Et ainsi, je l'empêcherais de faire ce qu'elle s'apprêtait à faire. J'avais le choix. Reculer et tout mettre au passé ou continuer, reprendre ce que nous avions mis en pause.

Elle n'avait pas eu le courage de me le dire avant, et elle avait été stupide pour laisser un papier décider de ce qu'elle ressentait. Mais tout cela semblait-être au passé. Droit, face à elle, je pense qu'il m'aurait suffit de pencher mon visage vers le sien pour rencontrer ses lèvres. Une proximité dérangeante dans un sens, une proximité avec laquelle j'allais devoir répondre.

« Je ne peux pas mentir en disant que là, maintenant, je ne ressens rien pour toi… »

Commençais-je dans un souffle.

« Mais je ne peux pas non plus te dire que c'est uniquement parce que je t'aime encore. »

Uniquement, certes, j'avais décidé d'avancer, mais je ne pouvais pas oublier ce que nous avions partagé.

« On s'est brulé les ailes, pourquoi vouloir recommencer ? »

Pourtant je ne détournais pas les yeux d'elle, les gardant figeaient sur les siens.

« J'ai repris ma vie, j'ai recommencer là ou j'avais tout arrêter… Je ne peux pas te dire, je ne peux pas te répondre Sophya, car je ne suis plus sur de rien nous concernant, si ce n'est que nous avons tout perdu. »

Reconstruire, reprendre. Je n'en savais rien.

« Et je ne sais pas quoi te dire, car je ne sais plus ce que tu attends de moi… »

Ou je ne voulais plus savoir. Je n'en savais rien. Mais ma raison disait une chose et mon corps une autre. Je ne pouvais pas bouger, j'étais figer face à elle, sans pouvoir reculer, sans pouvoir partir.

Dans le fond c'était une victoire et Sophya le savait. D'ailleurs, dans les orbes vertes se reflétaient ce petit éclat de joie, qu'elle peina à cacher. Les yeux bloqués dans ceux de Chase, la brunette n'aurait eu qu'à se tendre légèrement pour retrouver une légère étreinte avec son ex-mari, tendre la main pour caresser sa joue, se mettre sur la pointe des pieds pour effleurer ses lèvres. Pourquoi faire semblant de cacher ce qu'elle ressentait en cet instant, alors qu'il s'agissait peut-être de la dernière occasion qu'elle aurait de le lui avouer. Alors la juriste y mettait tout simplement le paquet, pour être juste de percer la carapace un peu je-m'en-foutiste du photographe.

S'il n'était pas sur de ses sentiments, il ne se reculait tout de même pas, ne se dérobait pas à la proximité que la médium avait instauré entre eux. Elle ne réagit pas à ses remarques, le laissant s'exprimer pour une fois, ne répondant qu'à sa question.

« Parce qu'aimer, c'est parfois souffrir, et faire souffrir. Mais si ce n'était pas le cas, alors ce ne serait pas de l'amour. Parce que ne rien ressentir, voudrait dire qu'il n'y a pas de sentiments. »

Philosophe, la petite. Toujours était-il qu'elle ne démordrait pas de ses positions, et tenterait de lui faire entendre raison. Humectant légèrement ses lèvres, Sophya pencha la tête sur le côté, ne désirant pas spécialement couper le contact visuel avec le brun. Depuis toujours, elle avait du mal à se créer de réelles attaches avec les gens. Rigoler un bon coup une soirée avec un inconnu, sourire à un passant, donner un dollar à un mendiant, oui. S'investir dans une relation et ressentir de vrais sentiments à l'égard de quelqu'un, ce n'était juste pas son truc. Alors dire que ce qui l'avait liée à Chase était en quelque sorte extraordinaire n'était pas un mensonge. Parce qu'il était l'unique personne à avoir su percer ce que seule sa famille adoptive avait su prendre également une place. Pour dire que l'exploit était grand.

La demoiselle poussa un léger soupir, n'osant pourtant pas bouger de peur de briser cet instant qui lui semblait si maigrement calme, prêt à être détruit au moindre geste de travers.

« Tu n'as pas à cesser de vivre pour moi. C'est aussi ça qui nous a condamné avant même qu'on ait eu une quelconque chance. Tu as ta vie et je le respecte. Tout comme désormais j'ai la mienne, avec un métier qui me plaît et la possibilité d'évoluer de manière différente. On ne doit pas vivre pour l'autre, on doit vivre avec l'autre. C'est ça la nuance qu'on a peut-être mal compris. Parce qu'on est deux handicapés des sentiments incapables de se livrer correctement. On n'a pas tout perdu. Si on avait tout perdu, on ne se serait pas engueulés comme on vient de le faire. On ne se regarderait même plus et on en n'aurait rien à foutre de l'autre. »

Elle s'avança légèrement, réduisant le maigre écart restant entre eux, avant de caresser sa joue.

« Je n'attends rien que tu ne veuilles pas. Je ne peux pas te forcer. Et tu ne peux pas me libérer parce que tu aimerais que je change. Je ne peux pas contrôler ce que je ressens. Et si toi, tu ressens encore quelque chose, tu ne peux pas le contrôler non plus. Ne réfléchis pas avec ta tête pour une fois. »

La jeune femme laissa retomber sa main, la déposant juste à l'endroit du coeur.

« Mais laisse le parler. C'est ça que j'attends de toi. Uniquement ça. »

De sa main libre, la jeune femme libéra la chaîne autour de son cou, révélant l'alliance qu'il lui avait donnée alors qu'ils s'étaient fiancés.

« J'ai écouté ma raison une fois. J'en ai souffert et tu en as souffert. Et si maintenant, on laissait pour une fois nos sentiments parler, plutôt que de tenter de tout mettre dans une cloison ? Après tout, notre histoire n'a pas commencé de manière raisonnable, souviens-toi. »

Elle étira un petit sourire, laissant retomber ses mains.

« Je ne te demande pas la lune. Si j'étais entièrement honnête, je te demanderais juste de m'aimer. Mais ce n'est pas comme ça que ça fonctionne hein? Alors ce que je te demande, c'est juste s'il y a une infime partie de toi, qui pourrait encore ressentir quelque chose pour moi. Même si elle est minuscule. Mais si elle existe, je veux juste le savoir. C'est ça que j'attends de toi, Chase. »

Philosophe ? Non car j'avais la sainte impression qu'elle me ressortait des discours digne de cours de philosophie de première. Souffrir et faire souffrir pour aimer, ressentir pour vivre… Je n'osais plus répondre, comme si la moindre de mes paroles suffiraient à me trahir, à lui me faire dire des choses que j'aurais préféré éviter. Et si moi je n'osais plus parler, elle, elle n'osait plus bouger, c'était évident. Elle reprit donc en disant que je n'avais pas à cesser de vivre pour elle, car le faire serait reproduire ce qui nous avait condamné. J'avais une vie, elle le savait, elle en avait par ailleurs une à présent. Ne pas vivre pour l'autre, mais avec l'autre… Une nuance sans doute mal comprise à l'époque mais qui aujourd'hui pouvait nous unir. En fait j'avais l'impression que l'engueulade que nous venions d'avoir lui avait fait croire que nous étions encore proche… Ce qui n'était pas forcement faux, mais qui pourtant, me dérangeait.

S'avançant vers moi, elle caressa ma joue avant de m'affirmer qu'elle n'attendait rien que je ne veuilles pas. Elle ne voulait pas me forcer, comme elle ne changerait pas sous mes désires. Ne pas réfléchir avec son cerveau, mais le faire avec son coeur… Étais-ce seulement possible ? Pour moi ? Pouvais-je faire ce qu'elle me demandait et ce tout en sentant sa main se glisser sur mon coeur ? Elle voulait donc que je parle avec mon coeur, rien que ça, uniquement ça, c'était difficile car mon coeur n'était pas si raisonnable que moi… Perdu dans mes pensées, je ne fis pas réellement attention à elle, pour être exacte, c'est la vue de l'alliance qui me fit reprendre contenance.

Elle essayait de me raisonner d'une façon assez spéciale, je devais l'avouer, mais le problème, c'est qu'elle posait des doutes dans mes convictions les plus profondes. J'avais mis tout cela de côté, mais si au final c'était une erreur ? Non, j'avançais, je ne regardais pas en arrière, mais alors pourquoi m'être arrêter là maintenant ?

Elle reprit alors en me disant qu'elle me demandait juste de l'aimer… Juste ? Non, elle ne pouvait pas demander la lune, mais elle cherchait bel et bien à ce que ce fragment de doute qui m'habitait aujourd'hui se manifeste afin qu'elle sache. Elle attendait juste de l'honnêteté…

« Juste … »

Répétais-je dans un souffle alors que mes lèvres trouvèrent les siennes avec une facilité qui m'étonna moi-même. Un souffle durant lequel, mes mains se glissèrent sur ses hanches, sur ses reins. Un souffle durant lequel je devenais maitre de sa respiration, durant lequel je me laissais agir sans bride. Un souffle. Ce ne fut pas long pourtant j'eus l'impression de passer une éternité à prendre ses lèvres. Ce ne fut pas long mais assez pour saisir mon coeur et mon âme lorsque je m'en séparais.

« Je ne peux pas nier que ça, c'est encore tellement naturel. Je ne peux pas te cacher que tant que je vivrais, une partie de moi sera toujours attaché à toi, qu'elle ne fera que penser à toi, qu'elle ne fera que te désirer. »

Cessant de caresser ses lèvres, j'avais repris un distance plus convenable entre nous.

« On a commencé dans la déraison, tu penses sincèrement que recommencer changera tous ? »

J'en doutais, mais ça, c'était le grand septique que j'étais qui parlé avant tout.

« Tu sais très bien que j'aurais du mal à me défaire de mon nouveau rythme de vie, non pas que je ne t'aime pas, mais rappelles toi bien que la fidélité est un concept floue pour moi, non pas car je manque de respect, mais car la fidélité à de tout temps représenté des chaines à mes yeux, les mêmes que le mariages imposent. »

J'avais su l'être avec elle, mais savoir que je n'avais pas le choix n'avait pas aidé à me sentir mieux. Ok, j'aurais sans doute pu passer des années sans le faire, sans la tromper, mais c'était le principe qui m'avait déranger dès le début et aussi le fait que je ne sois qu'un gosse à l'époque.

« On a loupé notre chance, je ne fais que rarement des concessions… Je veux bien croire en tout tes grands discours, mais comment veux-tu me faire oublier notre mariage ? »

Soupirant alors je repris.

« Prouves moi que l'on pourrait réellement commencer sans être handicaper par notre passé et je signe, mais là… J'ai du mal à penser que je pourrais avancer, avec toi. »

Le temps avait l'air suspendu alors que le jeune homme s'était approché et semblait bien silencieux. La brune releva ses yeux avant de percuter le regard légèrement troublé de Chase. Elle ne savait plus vraiment sur quel pied danser, comment réagir, mais en cet instant, elle se doutait que toute future action ou parole serait décisive. Ses yeux se fermèrent d'eux-même lorsqu'il se pencha pour saisir ses lèvres avec une délicatesse et une force qui l'étonna sur le moment-même. Sophya ne put s'empêcher de répondre à ce baiser, avec une douceur qui lui donnait un sentiment étrange. Nier qu'elle était bouleversée aurait été un mensonge et lorsque le photographe se décolla d'elle, la jeune femme ressentit un frisson la parcourir. C'était stupide, ces sensations d'adolescente, mais pourtant, c'était toujours aussi présent qu'auparavant.

Elle l'écouta parler sans l'interrompre. Qu'aurait-elle gagné à le faire de toute manière ? Autant qu'ils mettent les choses à plat si une relation autre que celle qu'ils entretenaient depuis le divorce devait se créer entre eux. La médium ferma les yeux quelques secondes avant de les rouvrir, penchant à nouveau la tête sur le côté, mordillant légèrement sa lèvre, avant de se lancer dans une réponse.

« Pourquoi devrait-on être toujours raisonnable ? Qu'est-ce que ça nous apportera de plus de l'être? Mais oui, je pense sincèrement que ça pourrait changer, Chase. Parce que si on a commis des erreurs une fois, on ne les fera pas une deuxième. Du moins, je l'espère. »

Sophya ancra son regard dans le sien, avant de glisser ses mains dans les poches de son pantalon. Elle le connaissait, depuis le temps qu'ils se fréquentaient. S'il lui ressortait ce genre de choses, c'est uniquement parce qu'il ne se sentait pas à l'aise, parce qu'il voulait se persuader que ce qu'elle voulait était en quelques sortes contre nature. Elle le laissa finir sa phrase, comprenant lentement où il voulait en venir. Si quelques instants plus tôt, la juriste avait eu l'impression de gagner une bataille, la guerre, elle, était loin d'être dans sa poche.

« Je ne te demande pas de me voir comme un poids. Ni de me promettre monts et merveilles. Je sais qui tu es Chase et je l'ai toujours su. On s'est imposés des standards, de réagir aux normes de la société. Mais nous ne sommes pas comme eux, et nous ne le serons jamais. Alors pourquoi faire semblant de croire en leurs concepts ? Je ne te demande pas de me jurer amour et fidélité. Je ne te l'ai jamais demandé – enfin si, mais pas vraiment en étant consciente de ce que ça représentait –. On n'a pas à précipiter les choses et à faire comme si on était un couple normal. »

Elle écoutait la suite de ce qu'il avait à dire, fronçant de temps à autre les sourcils sous l'attention qu'elle lui portait. La jeune femme n'avait pas souvent tenté de retenir quelqu'un dans sa vie, étant quasiment la personne qui finissait par foutre le camp. Aucune attache, aucun sentiment qui ne la retenait. Parce qu'elle avait grandi de cette façon et que même l'éducation offerte par les Turner n'avait pas pu changer cela.

« Je n'ai jamais retenu quiconque de toute ma vie. Tu es l'unique personne que je désire garder près de moi. Je ne veux pas recommencer notre simulacre de mariage où on se mitonnait de bons petits plats, où on passait toutes nos soirées devant la télévision avec un programme aussi stupide qu'abrutissant. Je veux notre passion, nos discussions, notre intérêt l'un dans l'autre. Je ne veux pas d'une relation traditionnelle où on finit par s'enchaîner l'un à l'autre pour le reste d'une vie. Je veux avancer avec toi, pas reculer avec toi. On devra y travailler, on devra faire des concessions. Comme partout. Mais on ne pourra jamais recommencer ce qu'on a vécu pendant quatre ans. »

La jeune femme sortit une main hors de sa poche avant de dégager quelques mèches de cheveux devant ses yeux.

« On ne peut pas faire comme s'il n'avait pas existé. Il a été là, et a été un poids dans notre relation. Mais... Il n'existe plus. Même si je garde cette alliance autour du cou. Je la garde uniquement, parce que tu me l'as offerte, pas parce qu'elle a représenté quoique ce soit de réel au sein de notre relation. Et parce qu'admettons-le, tu as un goût très prononcé en matière de bijou. Malgré tout, elle n'a jamais retrouvé mon doigt depuis que le divorce a été prononcé. Notre mariage est enterré Chase, et il ne reste qu'à nous de construire autre chose. »

Son regard se bloqua quelques instants sur la porte.

« Personne n'a droit qu'à une chance. Je suis bien placée pour le savoir non ? On m'a abandonnée, mais un couple a débarqué dans ma vie et s'est dit « cette petite est pour nous ». Ils m'ont adoptée. Je n'ai pas deux parents, mais quatre. Même si je fais semblant de ne pas en être consciente. Pourquoi nous, on n'y aurait pas droit ? Pourquoi on ne pourrait pas être nos propres parents cette fois-ci ? Je me moque des convenances, je ne regarde pas en arrière. Je regarde au présent. Et là, devant moi, c'est toi que je vois. Pas un autre, pas quelque chose d'autre. C'est toi. Je ne regarde pas à demain, ni à hier, mais à maintenant.»

Douée elle l'était, surtout lorsqu'elle remarquait une faille, surtout lorsqu'elle savait ou s'avancer. Recommencer, ne pas être raisonnable. Tant de mot, de phrase et de concepte qui traversèrent mon esprit, figeant mon corps alors que mon regard ne quittait plus le sien. Ses mots, je ne sais pas si c'était moi le problème, mais dans un sens, je ne voulais pas, je ne voulais vraiment pas céder. Mais j'avais l'impression que c'était déjà trop tard. Elle n'avait jamais retenu personne, sauf moi. Avais-je cherché à la retenir ? Je ne sais pas, mais j'avais, durant longtemps, pensais à faire les choses autrement, j'avais pensé à essayer de nous sauver, j'avais pensé à faire quelque chose pouvant nous tirer de notre impasse, mais je n'avais rien fait et aujourd'hui, il était trop tard. Alors pourquoi se battre ?

Il y avait-il quelque chose à recreer ? A retrouver dans les cendres de notre vie commune passé ? Visiblement, car plus elle parlait, plus je commençais à y croire, mais il y aurait bien des choses à clarifier avant et le fait que je pense à ça été bel et bien un signe que j'avais cédé, que j'avais déjà accepté. Je ne savais pas ou l'on irait, mais il y avait tellement de choses que l'on ne pouvait pas nier que finalement, nous avions en effet le droit à une seconde chance. Elle était réellement très forte. Je ne pouvais que le confirmer. Mais je n'étais pas faible de ne pas réussir à lui tenir tête ? Je ne sais pas, mais elle défendait ce que nous étions avec tant de force qu'au final, je n'arrivais pas à ignorer. Je ne pouvais réellement pas le faire.

« Ne t'attends pas à me voir tout les jours, ni même à ce que je te donne des nouvelles. »

Pour le moment, je préférais revenir en douceur vers elle, rien de plus.

« On ne parle pas de nos parents, je ne veux pas de belle mère. »

Sinon, nous ferions encore des erreurs et tout cela, n'aurait servi à rien au final, hors, je ne voulais plus de chose qui m'échappait. Je ne voulais pas suivre des chemins que je ne pourrais pas contrôler et parler belle mère serait un problème. Au passage, je ne lui avais pas interdit d'en parler à sa famille, elle faisait ce qu'elle voulait, mais je ne voulais tous simplement pas me retrouver à nouveau en costard dans une pièces close avec une femme me passant au crible. Sa mère adoptive était bien gentille, mais c'était un monstre dès qu'elle se souvenait que j'étais ou avais été son beau fils.

« Je ne vis pas chez toi, ni toi chez moi, tu vois qui tu veux, je vois qui je veux. »

Beaucoup de condition, je sais et si jusqu'à présent j'avais été sérieux au point de n'exprimer aucune émotion, je finis par sourire en disant.

« Mais ça, ne me le refuse pas... »

M'avançant alors, je glissais les mains le longs de son visage avant de l'embrasser avec moins de sagesse que précédement, mais aussi plus longtemps. Toutefois, après lui avoir volé son souffle, je posais mon front contre les siens avant de lui dire.

« N'attends rien de moi, laisses moi le temps de revenir vers toi, mais n'attends rien. »

J'étais redevenu sérieux, terriblement même alors que je libérais son visage de mon emprise. J'acceptais de recommencer avec elle, mais elle ne pouvait pas s'attendre à des miracles, elle ne pouvait pas penser que je reviendrais maintenant. Elle devait comprendre, attendre. Déraisonnable, je savais l'être, mais je devais malheureusement tenir un minimum de logique avec moi même.

Je devais aussi avouer que je n'avais fait ce genre de chose, tout du moins, me lier à quelqu'un sans m'attacher et je devais reconnaitre que je devais repousser à très loin cette petite voix qui me rappellait que je finirais par m'attacher car Sophya avait déjà réussi à le faire. Mais une seconde chance elle réclamait, alors je lui donnerais.

Elle avançait tout de même à tatillons, pas forcément très sure d'elle. Quand on avait son passé, au fond, on restait toujours très anxieux d'un possible rejet. Et Sophya devait avouer que ce sentiment était particulièrement effrayant, mais tellement envisageable dans de nombreuses situations. Et en ce moment même, ça lui pendait sous le nez, et plus que jamais, sa conscience en était avertie. Mais plus elle enchaînait son discours et plus elle pouvait percevoir l'écho qu'elle créait en son ex-mari. Pour un peu, elle aurait fait une danse de la victoire, juste pour pouvoir sautiller dans tous les sens. Elle hochait doucement la tête, étirant pourtant un léger sourire mutin.

Elle avait gagné. Pas la guerre, mais au moins une bonne vingtaine de batailles. Et ça, c'était le pied.

La brune acquiesça à la première requête, sans rien dire, le laissant continuer. Il ne valait mieux pas trop argumenter d'ailleurs, quand c'était dans ces conditions là, parce qu'une victoire sans concessions n'était pas une vraie victoire. Et puis, elle était plutôt d'accord avec ce qu'il lui disait, jusqu'ici. Son regard s'accrocha à celui du photographe, alors qu'un mouvement de tête positif.

« Ça tombe bien, j'en veux pas non plus. »

Sa relation avec sa belle-mère avait toujours été plus tendue qu'elle ne l'aurait imaginée. Puis vint le sujet qui dans une relation normale aurait pu poser un souci. Du moins pour n'importe quelle personne équilibrée, lorsque l'on se remettait en couple avec quelqu'un, on n'imaginait pas ce genre de choses. La plupart des gens voulaient une petite vie bien rangée, boulot, métro, dodo. Elle, elle avait toujours voulu d'un peu plus de piment, de différences. Sa vie n'avait jamais été réglementée que par des règles et des moments difficiles, et Sophya avait toujours estimé qu'il était de son devoir de la prendre en main dès qu'elle en aurait l'occasion, de ne se fier qu'à son instinct, quitte à dire aux autres d'aller se faire voir. Bon après, elle n'avait jamais été très volage, mais... cela lui convenait parfaitement.

Il s'avança alors, glissant sa main sur son visage et la jeune femme répondit à son sourire, spontanément, avant qu'il ne l'embrasse à nouveau. Si le baiser avait été plus long et plus fougueux que le premier, Sophya releva un regard amusé sur Chase une fois qu'il la laissa repartir avant de souffler doucement.

« Je n'y comptais pas. Et tu es libre de recommencer quand tu veux. »

L'invitation était claire, comme à son habitude. Sophya ne passait généralement pas par quatre chemins quand elle voulait quelque chose. Butée, têtue, lorsqu'elle s'était fixé un but, elle l'atteignait, quitte à y travailler des heures et des heures sans relâchement. Depuis son enfance, elle était ainsi, terriblement solitaire, renfermée, ne quémandant l'aide de personne pour parvenir à ses envies. Ce qu'on voulait, on l'obtenait par soi-même. Et si on ne l'obtenait pas, c'est qu'on ne le méritait pas ou qu'on n'avait fait aucun effort réel pour y tendre. Alors quand elle n'y arrivait pas, autant dire qu'elle finissait par y mettre le paquet.

Son sourire disparut légèrement, avant qu'elle ne hoche la tête pour signifier qu'elle comprenait parfaitement. Après tout, si ça avait été l'inverse, sans aucun doute que sa réaction aurait été identique, peut-être beaucoup plus forte. Son attachement même l'étonnait, elle qui était toujours si détachée de tous, qui n'avait pas envie de s'investir dans une quelconque relation et qui ne laissait personne entrer vraiment dans sa petite bulle.

« D'accord. »

Que dire de plus ? Et puis honnêtement, parler en ce moment, ce n'était pas trop son fort. Elle n'avait pas spécialement envie de dialoguer, de se prendre la tête. Autant prendre les choses comme elles venaient sans pour autant chercher à prendre la situation à l'envers. Et puis, comme elle se l'était dit précédemment, sa réaction aurait été exactement la même, alors, pas besoin de tergiverser pendant des heures sur le sujet.

Un nouveau sourire reprit sa place sur son visage et la brunette finit par le considérer à nouveau, dégageant légèrement ses cheveux pour les rejeter en arrière, et glissa, mutine.

« Et si maintenant on arrêtait de se prendre la tête sur des conditions et autres parlotes, et qu'on profitait un peu du moment présent ? Genre... tout de suite ? »

Elle releva un regard de biche sur lui, affichant une moue légèrement mutine. Autant profiter non ?

Des mots, mais des mots important car je savais que je n'aurais pas la force de fixer tout cela une fois que j'aurais replongé. Il serait impossible pour moi de me défaire à nouveau d'elle et si je n'étais pas moi-même franc dès le début, je n'aurais aucune chance d'éviter les erreurs déjà faites par le passé. Mais là, sur l'instant, ce qui m'intéressait le plus était bel et bien ses lèvres que j'embrassais sans retenu alors que je lui avais conseillé de ne jamais me le refuser. Et à en croire ses mots, j'avais le droit de recommencer quand je voulais. C'était, sans doute, mais ses lèvres m'avaient manqué, comme ma liberté et si nous avions une chance de combiner les deux, je pense que je serais sans doute le plus heureux des hommes. Enfin passons je mis les dernières choses au clair. Elle n'avait rien à attendre de moi, rien à me demander. D'accord ? Parfait, nous n'avions donc plus rien à nous dire, tout du moins plus rien d'important.

Un sourire apparut alors sur son visage alors qu'elle me demandait si l'on pouvait arrêter de se prendre la tête et si l'on ne pouvait pas profitait du moment présent, genre maintenant. Et la pas besoin de ses yeux de biche pour pirater mon esprit d'une multitude d'idée de d'images toutes plus … Enfin passons. Souriant à mon tours, je retrouvais ses lèvres avant que mes mains ne glissent sur son corps pour en saisir les hanches.

« Profiter… T'as une idée ? »

Demandais-je avant de me baisser légèrement et de saisir plus fermement ses hanches pour la porter jusqu'à sa table ou je la fis s'asseoir. Caressant lentement ses jambes qui m'entouraient, je repris possession de ses lèvres afin de lui voler un nouveau baiser. Il faudrait m'expliquer comment nous étions passé d'une journée de séparation complète à ça. Je veux dire que lorsque j'étais venu ici, j'étais loin de me douter une seule seconde de ça et j'aurais refusé toute proposition. Mais lorsqu'il était question de Sophya, je devais bien m'attendre à ce qu'elle me travail au corps. J'aurais du m'en douter qu'elle aurait pu trouver des arguments que je n'aurais même pas évoqué. J'aurais du m'en douter.

Ce n'était pas pour rien que je l'ignorais depuis genre des mois. Car déjà je savais qu'il suffirait d'un baiser pour me rappeler que je n'étais pas si indifférent à son contact. Enfin passons, plus j'y pensais plus j'avais l'impression qu'elle savait parfaitement ce qu'elle faisait, plus j'avais l'impression qu'elle avait prévu son coup. Ou pas, en fait je n'étais sur de rien en cet instant, si ce n'est que ces derniers mots m'avaient donné bien des idées, sauf peut-être celles de discuter.

« Ça serait plus sage pourtant… »

Parce que vu comment j'étais, ou je l'avais amené, je n'étais pas certain de pouvoir rester réellement sage et calme encore longtemps, mais à ma décharge, c'était de sa faute...

La brune étira un sourire amusé avant de se laisser saisir de pleine grâce et de se laisser porter vers la table. Elle dégagea le plat recouvert de fruits qui traînait dans son dos afin de ne pas être gênée, les jambes autour de la taille du brun, les bras passés autour de sa nuque pour s'assurer un meilleur soutien. Bah oui, pas question de tomber dans un moment pareil non plus. Sophya fronça légèrement le nez, avant de souffler doucement.

« J'ai toutes les idées du monde là tout de suite. Mais je pense qu'on a la même, non ?»

Avant de fondre à son tour sur les lèvres du photographe et de profiter pleinement du moment présent. C'était comme retrouver une partie de cette jeunesse qui avait eu l'air de s'envoler alors que la médium n'avait atteint que ses vingt-cinq ans. La jeune femme ne pouvait nier être très fière de son petit effet, et pour une fois, elle décida d'arrêter de parler et juste de profiter. Ce n'était pas quelque chose de courant, et les seuls moments où ses lèvres ne se mouvaient pas et où aucun son ne franchissait l'espace n'était que lors de son sommeil – et encore, parfois il lui arrivait d'avoir de véritables conversations avec elle même – ou de moments très... particuliers. Doucement, elle glissa ses mains sous le t-shirt du brun, caressant distraitement le grain de peau qui lui avait, mine de rien, tant manqué, taquinant la texture souple, sans pour autant se montrer trop intrusive.

Libre à Chase de la repousser ou non. Encore une fois, elle ne lui forçait aucunement la main. Elle se dégagea doucement, laissant sa main reposer là où elle l'avait glissée, tandis que l'autre restait sur la nuque du jeune homme. Ils avaient traversé beaucoup de choses ensemble et la jeune femme savait que d'une manière ou d'une autre, ils resteraient présents dans la vie de l'autre, dusse cette aventure ne mener strictement nulle part. La brunette le considéra alors du regard, avant de rehausser un sourcil.

« Tu dois vraiment vieillir pour devenir si sage... »

Et à nouveau, elle se saisit des lèvres accueillantes du brun, tout en retirant son propre gilet, et de le balancer à travers la pièce. Sophya repositionna ensuite ses bras autour du cou du brun, souriant contre ses lèvres et profitant de l'instant présent. Mais c'était sans compter l’opiniâtreté d'un certain esprit. Une porte claqua dans un premier temps, faisant sursauter violemment la jeune femme. Elle se décolla légèrement du brun, avant de regarder à gauche et à droite à la recherche de sa future victime déjà morte. Elle poussa un profond soupir, avant de revenir à sa distraction du moment. Haussant les épaules, la brune glissa à nouveau ses mains vers les épaules du photographe alors qu'un bruit se faisait entendre à la salle de bain. Bah, tant qu'il restait là, il ne les dérangerait pas. Se rapprochant un peu plus près du brun, Sophya laissa échapper une plainte alors qu'elle entendait le robinet de la baignoire s'ouvrir et l'eau commencer à couler dans le bassin. Mais c'était vraiment pas possible...

A contre coeur, la brune déposa un nouveau baiser sur les lèvres du brun, avant de se dégager et de se relever.

« Et voila mon Alastair personnel... »

Elle se dirigea à grands pas vers la salle de bain avant de l'ouvrir à la volée et de fermer les robinets, alors qu'Elijah avait déjà disparu dans le salon devant le regard courroucé de la médium. Amusé, il faisait fi de la jeune femme, tournant autour de Chase, l'évaluant du regard. Les bras croisés, la brune marmonna.

« Barre-toi... Et fous-nous la paix. »

Mais l'esprit ne l'écoutait déjà plus. Le grand noir offrait un regard mi-amusé, mi-sérieux à Chase, avant de lui souffler, de manière parfaitement audible.

« Elle aurait pu trouver mieux quand même... »

Avant de se prendre une chaussure volante, traversant la pièce, et d'éclater de rire, pour finir par rejoindre le miroir du salon.

« Et voila comment casser un petit moment... Made in Elijah. »

C'était qu'il se marrait vraiment bien, en plus, le con...

Qui aurait pu prédire que la journée finira ainsi ? Qui pouvait dire que j'aurais fini par l'attirer sur sa table avec faire autre chose que parler ? Je ne sais pas, cette histoire me perturbé, elle était plus compliqué qu'elle ne l'aurait du. Se remettre ensemble essayer sans refaire les même erreurs, je n'étais pas certain, mais elle m'avait demandé de lâcher prise, alors j'allais lâcher prise. Le plus simple, la réaction la plus naturelle que j'avais pu avoir en cet instant était de me laisser porter par ce qui nous avait réunis à l'époque. Mais quelqu'un ne sembla pas d'accord et une porte claqua une première fois, nous arrêtant un instant avant qu'après un silence profond ne reprenne son appartement nous poussant ainsi à retrouver l'autre. Mais ce ne fut qu'éphémère car de l'eau commença à couler et après un ultime baiser, Sophya s'échappa.

« Alastair a le mérite de m'offrir des clichés à plusieurs centaines de dollars… »

Soufflais-je avant de la regarder remettre tous en ordre. Rapidement, et alors que je remettais un peu d'ordre dans mes propres vêtements, j'eus la désagréable impression qu'être contourné. Sympa d'être ainsi détaillé… Sophya lui demanda alors de se barrer, mais ce n'était pas l'avis de l'esprit qui s'amusait visiblement bien. Trouver mieux ? Oui sans doute…

« On parle de qui là ? »

Je n'étais pas spécialement frustré, il n'avait pas coupé un moment trop critique, mais je n'étais pas autant plus sympathique. Une chaussure vola alors et l'esprit s'éloigna. Levant les épaules, je bougeais pour aller récupérer cette dernière afin de la rendre à son propriétaire. M'approchant alors de Sophya, je l'embrassais avant de lui dire.

« Deux solution, soit je pars et je te laisse lâchement avec ton meilleur ami, soit tu pars avec moi et on laisse lâchement ton meilleur ami. »

Non pas que je tenais absolument à passer ma journée avec elle, mais disons qu'il était pas dérangeant qu'elle m'accompagne. Et puis emmerder un esprit n'était pas pour me déplaire personnellement.

« Elijah, heureux d'avoir fait ta rencontre. »

Soufflais-je avant de reculer vers la porte.

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