Alastair tournait en rond, il s'ennuyait. Il grognait de temps en temps comme un ours mal-léché. Il se trouvait dans le musée du vaudou pour tenter de s'occuper mais en vain. Il y avait une certaine agitation qui l'habitait, une agitation qui ne semblait pas prête de le quitter, bien au contraire. C'était comme quelque chose qui le dévorait depuis l'intérieur et ne voulait pas s'arrêter. Sa dernière entrevue avec Sophya l'avait particulièrement bouleversé et quand Furfur était bouleversé, il était ingérable. Il marchait entre les vitrines qui contenaient quelques poupées vaudou particulièrement folklorique. Mais rien là-dedans ne l'intéressait. Le Dibbouk se prit la tête entre les mains, s'accroupit et soudainement, son énergie se manifesta, faisant vibrer les vitres sans pour autant les faire exploser. Il devait respirer, il devait se reprendre mais il n'arrivait pas. Alastair n'arrivait plus à remonter. L'homme se redressa et donna un violent coup contre le mur. Un crac sonore retentit, le mur se fissura tandis qu'il observa les dégâts qu'il venait de commettre et qu'un sourire mauvais se dessina sur son visage. Il était content de lui.

La rage qui bouillonnait en lui venait de largement s'apaiser, il se sentait soudainement mieux. Ce sentiment qui le torturait depuis l'aube cessa de tournoyer en lui et lentement, le Dibbouk s'assit en tailleur au milieu du couloir, invisible pour le reste des mortels. Il devrait envisager d'aller embêter quelqu'un pour s'occuper, ce ne serait pas une mauvaise chose à faire. Furfur se redressa et décida d'aller faire un tour à l'hôpital, peut-être que là-bas, il trouverait son bonheur. Rien n'était jamais impossible. Passant à travers des murs et des cloisons, il fut bientôt dans la rue et se dirigea vers le lourd bâtiment. Il avait une vague idée de qui trouver dans l'hôpital, Ludwik. Le poltergeist qui traînait avec les enfants malades. Ils s'étaient connus vivants et s'étaient retrouvés une fois morts. Pas vraiment une chance quand on savait que Ludwik avait plumé l'irlandais aux cartes.

Alastair était particulièrement mauvais joueur quand il s'y mettait. Plus de deux siècles après, il n'avait toujours pas digéré sa défaite aux cartes. Il s'introduit calmement dans l'hôpital et chercha le service pédiatrique. Il y trouverait forcément l'autre esprit. Il ignorait les pleures des enfants qui étaient malades. Même une partie de son être qui avait été père ne réagissait plus quand il voyait le malheur dans les yeux des enfants. Il en restait complètement et définitivement indifférent. Le Dibbouk continua de chercher l'autre esprit, se demandant bien où se trouvait ce bougre. Finalement, il le trouva au détour d'un couloir et un sourire mauvais s'afficha sur son visage.

« Te voilà enfin ! »

Il s'approcha de Ludwig jusqu'à pouvoir le toiser sans aucun effort.

« Tu vas encore aider les plus défavorisés ? Ce genre de connerie. Quand changeras-tu, hein ? Ça va faire deux siècles que tu tournes en rond. »

Dit l'ancien palefrenier en faisant claquer sa langue contre son palet. Non pas de comment « vas-tu », « salut » ou ce genre de politesse. Très peu pour lui ! Il avait plus envie de le frapper directement mais Furfur restait encore poli. A part ça, il n'y avait pas que Ludwig qui tournait en rond, il y avait aussi le Dibbouk. Chaque année il répétait le même schéma, la même histoire. Le fait que Sophya l'empêchait de tourner en rond et cassait son schéma le déstabilisait particulièrement et il n'aimait pas être déstabilisé, bien au contraire. Il aimait bien faire ses petites affaires sans jamais été dérangé. Alastair revint sur le présent, se demandant bien qui Ludwig comptait aller visiter, quel enfant en particulier. Furfur avait bien débranché une fois un enfant pour déranger le poltergeist. Son but ? Le pousser à devenir mauvais, à devenir un Dibbouk, rejoindre le côté obscur de la force en somme.