Alastair assis à même le sol, lançait une balle à deux centimètres d'un tableau d'art. Il s'ennuyait mortellement dans le musée d'art de Mid-City mais il était convaincu que très prochainement il trouverait une occupation. Le Dibbouk bailla longuement et lâcha soudainement la balle quand il vit un gardien pénétrer la pièce. Il était invisible aux yeux des vivants. Lentement, Furfur se redressa tandis qu'il observa le gardien. Le mauvais esprit passa à côté de lui et étudia sa matraque du regard. Hum... Il avait bien envie de jouer mais se retint. Pourquoi se retenir ? Aucune idée mais il décida de quitter la pièce et de laisser le gardien avec son dilemme de balle. Le pauvre, il allait commencer à se demander qui était le rôdeur dans les couloirs qui lançait une balle. Le pas léger, Furfur se retrouva bientôt dans le parc de Mid. Il y avait de l'agitation, des foutus touristes depuis qu'un nouveau salon de spiritisme avait ouvert ici. Ce que Alastair détestait ces faux salons. Il n'y avait rien de pire comme connerie mais pour les esprits, cela ouvrait les portes.

Des portes si grandes qu'ils s'y glissaient pour créer du chaos. Le Dibbouk passa à côté d'une gentille petite famille et envoya voler le chapeau de la petite qui se mit à pleurer, ayant senti que quelque chose clochait. Aussitôt sa mère se préoccupa d'elle et Furfur se mit derrière elle. Il attrapa une mèche de cheveux et tira sèchement dessus. La femme geignit et regarda son autre enfant qu'elle engueula sous le regard médusé de son compagnon. Le Dibbouk fit un sourire mauvais, rien de mieux que de l'agitation pour occuper son côté terriblement mauvais. Il se détourna de ce sacré duo et passa l'allée bordée de chênes, quelque chose attira son attention et le fit s'arrêter. Les esprits se reconnaissaient entre eux et cette vieille femme qui déambulait lui disait quelque chose. Il la toisa, elle et sa tenue d'un autre temps. L'amérindienne le regarda étrangement et fit un sourire cynique. Elle avait les yeux crevés, la gorge ouverte, c'était ainsi qu'elle était morte.

« Un esprit de colon, espèce de saleté de blanc.
- Ne me cherche pas la vieille. »

Souffla-t-il avec rage. L'esprit amérindien fit un drôle de sourire et s'approcha de lui. Alastair piqua la mouche et lui envoya une décharge d'énergie qui repoussa la vieille indienne qui geignit. Elle avait intérêt à comprendre rapidement qui commandait ici et c'était lui le chef. Il n'aimait pas qu'on l'emmerde, pas du tout. Alastair n'était pas un rigolo quand il s'agissait de tolérer les autres esprits. Le Dibbouk souffla et observa la vieille le contourner pour partir dans l'autre sens, ayant compris que s'ils commençaient ainsi, ils ne s'en sortiraient pas. Alastair fit craquer sa nuque et continua son chemin tandis que les passants n'avaient vu que voler des feuilles sans coup de vent, étrange, n'est-ce pas ? Le Dibbouk s'arrêta quelques mètres plus loin en reconnaissant une tête brune qui semblait occuper à faire quelque chose, lire, écrire ? Aucune idée mais il la reconnut. Tamina. Depuis quelque temps il la suivait, l'étudiant pour trouver ses habitudes pour ainsi mieux l'enquiquiner. Il adorait ce genre de fille.

Il adorait les faibles. Surtout que le Dibbouk avait vraiment besoin d'un corps d'emprunt et qu'en ce moment, il galérait vraiment pour en trouver un. Furfur passa derrière un tronc d'arbre et d'une poussée d'énergie, se rendit visible. Il s'approcha du banc et s'assit à côté d'elle, les bras sur les accoudoirs. Alastair allait tenter une première approche avec sa future victime. Il portait sa dernière tenue avant de mourir. C'est-à-dire un vieux pantalon usé, des bottes d'équitation dans le même état et une chemise foncée aux manches relevées. Son visage était mal-rasé mais à l'époque, il était plus occupé à massacrer sa défunte épouse qu'à se raser.

« Bonjour, vous faites quoi ? »

Première approche. Il pencha la tête de côté, quelqu'un de normal aurait cherché à voir si elle lisait ou quoi mais il n'était pas quelqu'un de normal. Alastair la détailla, sachant pertinemment ce que renvoyait son regard bleu clair, une lueur de charme. C'était un charmeur et il adorait charmer ses proies.

« Je me permets de m'asseoir, les autres bancs sont pleins. On a une montée de touristes en ce moment. »

Il ne mentait pas, les bancs étaient pris d'assaut par les touristes qui flânaient dans le parc pour se reposer. Alastair posa un instant son regard sur la famille qu'il avait tourmenté auparavant. La mère gueulait plus fort que le père mais ce qui était sûr, c'était que les deux adultes se bagarraient devant leurs progénitures. Super, rien de mieux pour s'amuser ! Il fit un sourire mauvais.

Alastair ne penserait pas qu'une femme se laisserait aborder si facilement. On racontait qu'elles se méfiaient vite, surtout avec les cas de viol. D'un côté, sa théorie des bancs pleins tenait la route, il n'inventait pas complètement encore. Ces bancs étaient bel et bien pris par ces hordes de touristes. Pourquoi ne pas posséder un touriste ? Cela aurait été plus facile mais de toute manière, Furfur n'avait pas assez d'énergie pour effectuer le rituel de possession. Il la regarda fermer vivement son dossier. Comme s'il allait s'amuser à le lire ! Alastair n'était pas ce genre d'homme, tout simplement. Lui il s'amusait plus à terroriser les pauvres brebis égarées, c'était bien plus drôle à dire vrai. Il pencha la tête sur le côté quand elle lui demanda ce qu'il faisait ici. La réponse était aussi claire que de l'eau de roche :

« Rien, je profite de cet instant, tout simplement. »

Et il étudiait une victime potentielle, satisfaite ? Un sourire enjôleur naquit sur ses traits tandis qu'il suivit du regard une femme qui semblait vraiment perdu. Lui seul la voyait car elle était comme lui, un esprit. Elle devait vraiment être jeune car elle marmonnait tout seule et tentait d'attirer l'attention des humains sans qu'ils fassent attention à elle, bien entendu. Furfur trouvait ce genre d'esprits vraiment pitoyables. C'étaient ceux dont on ne pouvait vraiment rien tirer, pas un mouvement, pas un sentiment bon sang. A croire qu'ils étaient aussi froids que du givre. D'un côté, le Dibbouk s'en moquait comme de l'an quarante, lui, cela ne l'intéressait pas de converser avec les autres esprits, bien au contraire. Il les voyait comme des ennemis capables de lui voler les corps qu'il convoitait chez les vivants.

« Et donc, vous avez pour habitude de venir ici ? Je veux dire, ce n'est pas vraiment conseillé quand on a l'allure d'une petite brindille. »

Était-ce un compliment qu'il faisait ou une très vilaine remarque ? A voir, même le Dibbouk lui-même ne le savait pas pour le coup. Son regard se durcit, tandis qu'il étudia cette fine fleur qu'il avait de plus en plus envie d'agresser. Le but était de lui faire perdre la tête. Le mauvais esprit tendit la main et envoya voler le dossier d'une poussée d'énergie. Il regard les feuilles voler avec un intérêt soudain. Comme si on éteignait une lumière, il disparut. Il jouait et terriblement même. Bien décidé à faire peur à l'humaine, à la déstabiliser. Les humains ignoraient souvent tout de l'autre côté du miroir, de cette histoire d'esprits et ce qu'ils représentaient en réalité. Le Dibbouk, maintenant invisible, se leva et se mit derrière Tamina. Dommage qu'il ne puisse pas la toucher, c'était ce qui lui manquait le plus. Toucher ses victimes. Il souffla sur sa nuque et d'une autre poussée d'énergie, se rendit visible. Avec un peu de chance, elle se dirait vraiment qu'il avait un problème et pas des moindres.

Il ne voulait que cela, même si Alastair pouvait tout autant se montrer cajoleur que violent pour déstabiliser les femmes. Il était un sacré empêcheur de tourner en rond quand il s'y mettait sérieusement. Le mauvais esprit ricana d'un air tout à fait mauvais.

« Pourquoi, comment, où ? »

Il se foutait de sa gueule avant qu'elle ne pose toutes ces questions qu'il connaissait par cœur. On disait que les esprits tournaient en rond mais les humains franchement, ne valaient pas mieux. Oh oui le Dibbouk avait vraiment une dent contre les humains, et particulièrement les humaines, en ce moment. Il n'avait pas pu satisfaire sa soif de sang, de viscères et donc, il devenait aussi sympathique qu'une porte de grange pour le coup. Pas lui qui allait faire des efforts, pas le moins du monde. Dans cette histoire, face à Tamina, ce seraient les paroles d'une humaine terrifiée face à un esprit qui se rendait invisible. Franchement, qui serait désigné folle rapidement ? Hum je vous laisse deviner !

Il n'y avait rien de plus chiant dans la vie que les gens sympas. Ils étaient si doux, si....mièvres, voilà c'était le mot. Cette femme était si douce qu'Alastair rêvait vraiment de la briser entre ses doigts, la voir se défaire comme une simple petite poupée. Il n'y avait rien de pire que la douceur pour attiser sa rage. Elle savait bien se défendre ? Il allait vérifier cela. Le Dibbouk la vit bien sursauter quand il fit voler ses feuilles. Ah, soudainement c'était moins drôle, pas vrai madame la rationnelle ? On aurait dit une pauvre biche tandis qu'elle se levait et semblait trembler sur ses pattes. Furfur s'amusait bien trop pour se rendre visible mais l'attention était bien là. Il adorait observer cette femme et la voir s'interroger sur le sens de la vie à cet instant. Pourquoi, comment, où ? Ah les vivants avaient toujours les mêmes questions et c'était si amusant qu'il se retenait difficilement de rire mais ne le faisait pas pour l'instant. Il y avait des gens si pitoyables dans la vie qu'ils donnaient envie de s'arracher la tête. Alastair s'assit sur le banc, toujours invisible, et l'écouta dire qu'il ne devait pas s'approcher d'elle. Si elle commençait ainsi alors qu'elle ne le voyait pas, ils n'allaient pas s'en sortir.

D'une poussée d'énergie, le mauvais esprit se rendit visible. Il semblait étonnement calme sur son banc et il adorait voir l'autre femme paniquer. Peut-être qu'il arriverait à la faire fuir sans bouger, il se demandait à quel point elle serait réellement résistante. Et encore la même question. Sérieux, pourquoi en 249 ans les gens ne se renouvelaient pas dans les questions ? Il y avait une questionnaire des dix premières questions à poser quand vous rencontriez un esprit, c'était cela ? Peut-être, il devrait tenter de trouver le bouquin et donc l'écrivain qui avait fait le top teen des dix questions pourries à poser au premier esprit que vous croisiez.

« Comment ça je suis quoi ? »

Il jouait parfaitement le crétin de service mais là, c'était tellement tentant qu'il ne pouvait se retenir. Et pis, comprenez-le bien, c'était vexant de se faire demander ce qu'on était. Comme si on était un objet qu'on sortait d'un carton poussiéreux et qu'on se demandait si c'était vivant ou pas. Non franchement, il fallait respecter un minimum les morts si on voulait qu'ils nous respectent. Bien entendu, Alastair ne pouvait expliquer cela à la femme en face de lui sans se dévoiler. Hors, c'était bien la dernière chose au monde qu'il voulait faire. Il ne voulait pas se dévoiler d'un millimètre carré, bien au contraire. Il voulait faire passer les autres pour fous, c'était un peu légitime, pas vrai ? Il fallait bien s'occuper, passer le temps, ce genre de choses en somme.

« Par contre, je peux vous demander ce que vous êtes, vous. Vous avez sauté de ce banc comme si vous voyiez le Diable. Vous êtes sûre que tout va bien ? »

Il pencha la tête de côté, continuant de la toiser comme si c'était la folle du siècle. On avait pas idée de sauter comme un cabri juste à cause d'un coup de vent.

« Allez, venez vous asseoir, vous allez faire un arrêt cardiaque encore. Vous devriez dormir plus. Vous savez, vous avez la tête de la nana qui ne dort pas. »

Il faisait exprès de lui embrouiller la tête. Technique de base quand on était un mauvais esprit et qu'on voulait convaincre un vivant qu'il avait un sérieux problème. Qu'il devait consulter, ce genre de choses en somme. Il était doué pour faire croire aux autres que c'étaient eux les fous de l'histoire et non pas lui. Sauf que là, il ignorait qu'il venait de tomber sur une psychologue et que cela allait être plus dure que prévu.

Alastair était parfaitement calme, ne bronchant pas. La question de Tamina ne manqua pas de le faire sourire.

« Comment je fais ça ? »

Il la jouait en mode perroquet. C'était sa manière d'éviter de répondre aux questions. Lentement, le cavalier se pencha en avant, les coudes sur les cuisses, un léger sourire en coin. Il ne prenait pas beaucoup de place mais avait tout de même trouvé moyen d'avoir le banc rien qu'à lui. Oh il s'en moquait d'avoir ce foutu banc pour lui tout seul. Bien au contraire. Mais c'était juste histoire d'avoir gagné quelques mètres et cela ne manquait pas de lui faire plaisir pour le coup. Par contre, quand le dibbouk l'entendit rire nerveusement, il se dit qu'elle commençait gentiment mais sûrement à toucher le fond. Elle passait pour une folle, debout devant le banc, les bras croisés. Du moins c'était ainsi qu'on pouvait prendre la scène vu de l'extérieur, si on n'y prenait pas garde. Par contre, elle devait sérieusement penser à réviser son anglais car son début de phrase ne voulait rien dire.

« On ne vous a pas appris à parler anglais ou quoi ? Je ne comprends pas, je ne dois pas jouer ce petit jeu avec vous ? Et ben, votre niveau de langue est minable. »

Malgré sa classe sociale, Alastair avait un meilleur anglais que certaines personnes de cette époque. Car il avait appris le vieil anglais, celui de deux siècles en arrière. Oh, bien entendu, à force d'entendre les jeunes ici, il avait compris comment formuler une phrase correcte. Ce qui lui permettait ainsi de communiquer normalement avec les vivants d'aujourd'hui sans paraître complètement fantasque. Néanmoins, son accent n'avait rien de celui des États-Unis. Il avait un accent irlandais si on tentait bien l'oreille. Né en Irlande, il avait grandi dans son pays natal quelques années avant d'immigrer aux États-Unis avec toute sa famille. Un colon, voilà ce qu'il était. Il n'en n'avait pas honte, bien au contraire. En tout cas, il se sentait bien moins déboussolé que la petite dame en face de lui. Théoriquement parlant, il la connaissait, il l'avait observée. Mais bon, Furfur ne pouvait pas vraiment le dire. Mais elle l'amusait et il ne manqua pas de sourire. Cela avait du bon de l'amuser, de le divertir de cette manière. Elle lui faisait passer le temps avec ses petites bêtises. De quoi en bien rire !

Rire, ce fut ce qu'il fit quand un rire s'échappa de sa bouche. Là pour le coup, le mauvais esprit ne pouvait pas se retenir. C'était toujours comique de recevoir des avertissements de la part des vivants quand c'était vous le danger public. Son rire grave et bas résonnait dans le parc un peu vide. Un rire qui pouvait faire penser à la texture du miel tant il semblait dense, riche. Alastair cessa de rire, penchant la tête de côté, continuant de toiser Tamina. Pauvre fille, il s'amuserait délicieusement à la briser.

« Quand on veut donner des ordres, il faut le pouvoir qui va avec et tu ne l'as pas. »

Elle ne l'avait du tout même. Alastair ne bougeait pas, mais si on observait son attitude du corps on ne pouvait passer à côté de l'hostilité qu'il dégageait. Il n'était pas bisounours, encore moins peace and love. Et la petite avait intérêt à ne pas dépasser les bornes sinon la prochaine fois, il n'allait pas rire mais lui faire du mal.

« Qu'est-ce que je te veux ? Je ne sais pas, tout dépend de toi. Mais je dirais bien que tu n'es pas ouverte d'esprit, bien au contraire. Tu es hermétique. »

Dit-il avec un sourire mauvais en coin. Il se leva de son banc et s'approcha lentement d'elle, se demandant si elle allait reculer à son passage ou pas. Ce serait rigolo à voir si elle le faisait.

« Tu n'es pas folle ? Je n'en suis pas si sûr. Es-tu honnête avec toi-même et ton cher patient ? Hum ? Je ne pense pas, pas du tout même. »

Le mauvais esprit s'arrêta. Chacun avait ses failles et il était sûr que cette cruche commençait à avoir le béguin pour un de ses patients. C'était prévisible, terriblement prévisible même. Les gens étaient si prévisibles, ils ne changeaient pas en deux siècles, pas vraiment. Les mœurs changeaient, soit-disant mais au final, on faisait une sorte de cycle. Ce qui avait été à sa mode, deux siècles auparavant, reviendrait bien un jour. Et encore, Alastair aimait vraiment mieux son époque que celle-ci. M'enfin, cela ne restait que son avis, bien entendu.

Spoiler:

Spoiler:

Elle lui interdisait de se moquer d'elle ? C'était un peu le pompon là ! Alastair ne manqua pas de sourire avec moquerie, se retenant visiblement de rire. Les gens avaient beaucoup d'humour quand ils s'y mettaient et Tamina semblait en faire parti. Le Dibbouk bailla longuement, ne cachant pas son ennuie mais ce n'était qu'un jeu. En réalité, il s'amusait comme un petit fou. Il était extrêmement difficile de lui faire croire de laisser les vivants. Il faisait ce petit jeu de tourmenter depuis près de deux siècles donc forcément, il était têtu quand il s'agissait de torturer quelqu'un.

« Outch, touché princesse ! »

Dit-il avec un petit sourire en coin en posant les mains au niveau de son corps quand elle dit qu'elle au moins, ne terrorisait personne. Par contre pour aller voir ailleurs, elle pouvait toujours rêver. Alastair se sentait comme le maître des lieux et difficile de déloger quelqu'un quand il se sentait comme le maître des lieux. Théoriquement, il ne pouvait rien lui faire, il ne pouvait pas l'atteindre physiquement mais le pouvait psychologiquement ou avec des objets. Mais c'était beau de croire à l'innocence du monde car personnellement, il n'y croyait pas. Alastair était mort humain, convaincu de la méchanceté de sa propre espèce. Il avait vu la déchéance des gens, les vices les plus affreux, les jeux de carte, l'alcool. Pour avoir été alcoolique, il savait qu'on pouvait aller loin par simple vice. Furfur voyait bien qu'elle se tendait progressivement, soit son instinct devait lui hurler qu'elle était en danger, soit elle le comprenait d'elle-même. Alastair s'en moquait, lui le plus important, c'était de voir un peu de peur, de sentir la panique qui sortait des pores.

Justement, il adorait juger les gens qu'il ne connaissait pas. Le Dibbouk adorait coller des étiquettes et tenter de voir s'il avait raison ou pas. Alors, face à l'ordre de la petite psychologue, il haussa négligemment des épaules. Néanmoins, il continua son petit jeu et se leva pour s'approcher lentement de la femme. Alastair lâcha un rire mauvais quand il la vit reculer.

« Bouh ! »

Pour un peu, la pauvre allait partir en courant. En faite, secrètement, le Dibbouk espérait qu'elle allait prendre ses jambes à son cou et courir. Mais c'était permis de rêver, elle s'accrochait la garce ! Surtout quand Maddox venait dans la conversation. Alastair connaissait ce pauvre gamin qui ne semblait rien comprendre à l'univers qui l'entourait. Il n'était pas rare de voir un médium à moitié cinglé, ignorant ce qu'il était en réalité. Le mauvais esprit en avait croisé plus d'un durant son existence. Pas pour autant qu'il avait envie de les aider.

« Peut-être bien mais je connais Maddox. Il te plaît, n'est-ce pas ? Tu minaudes devant lui. Tu es une femme et les femmes adorent tenter les hommes, ne joue pas les innocentes. »

Il n'y avait pas eu que Rebecca dans sa vie et Alastair se doutait bien comment fonctionnait les femmes. C'étaient les tentatrices de l'univers et elles ne manquaient pas de vous faire sentir comme l'objet de vos pulsions. Combien de fois Rebecca l'avait-elle eu ainsi ? Alors non, les femmes n'étaient pas innocentes, elles détenaient secrètement le pouvoir, soumettaient les hommes et après, venaient pleurnicher quand il leur arrivait quelque chose. C'était bien pour cela qu'Alastair détestait les femmes et ne manquait pas de les tuer depuis plus de deux cents ans. C'était sa manière de se venger de Rebecca et de tous les affronts qu'elle lui avait fait. Le mauvais esprit ne bougeait plus, on aurait dit une statue mais pas du tout une statue inoffensive pour le coup.

« On joue à un petit jeu ? Celui qui le mènera le plus vite en enfer. Tu vas le perdre mais je me demande si ce sera de ta faute ou de la mienne. »

Dit-il d'une mine extrêmement pensive. Il était sérieux, très sérieux même, malgré les mots durs qu'il avait. Furfur n'avait aucun mal à parler aussi durement. C'était quelque chose qu'il avait intégré bien avant sa mort.

Il n'arrivait pas à la faire fuir ou hurler. C'était frustrant et ce n'était rien de le dire. La bouche d'Alastair fit un pli amer quand elle lui dit de la laisser tranquille. Oui mais non, il ne voulait pas. Il restait campé sur ses positions et ce n'était rien de le dire. Son regard clair s'attardait sur la silhouette fine de Tamina. Enfin elle recula quand il se rapprocha d'elle. Furfur n'avouerait pas facilement à une vulgaire humaine ce qu'il était, bien au contraire. Il préférait garder pour lui tout cela. Le Dibbouk s'arrêta quand la brune lui demanda si cela l'amusait de faire peur aux gens. C'était difficile à dire. Il plissa les yeux, légèrement contrarié, ne sachant pas quoi répondre. Amuser était un terme bien trop vulgaire pour simplement désigner le plaisir qu'il prenait à torturer les vivants.

« Si on veut. »

Il n'avait pas envie de la satisfaire mais répondait tout de même à la question. Après, si elle n'était pas contente de la réponse, tant pis pour elle. Le mauvais esprit croisa ses bras sur son torse, ne la lâchant pas du regard. Ils ne s'appréciaient pas, c'était un fait mais il y avait autre chose. Alastair avait le don de ne pas aimer les gens et cela gratuitement. Il préférait attaquer le premier, c'était ainsi. Finalement, Furfur décida d'attaquer autrement en parlant de Maddox. Il avait bien vu que la psychologue et son patient avaient un certain lien. Quelque chose lui échappait à ce propos mais il ne comptait pas se gêner pour embêter Tamina et entraîner le faible médium au fond. Surtout que Maddox ne semblait pas du tout avoir conscience du don qu'il avait et de sa capacité de médium. Dans quel siècle il vivait ? Malheureusement, à cette époque-ci même s'il avait vécu au 18ème, une époque qui lui manquait. A son époque, les femmes ne vous parlaient pas sur ce ton et certaines règles étaient différentes, pour son ancien bonheur.

Un sourire mauvais traversa son visage à l'évocation des femmes. Contrairement à ce qu'on pouvait penser, Alastair avait cette pointe de charisme qui avait fasciné les femmes et les avait attirées auprès de lui. Il avait eu ce petit côté mauvais garçon qui faisait tourner les têtes. Mais ce qui avait été qu'un style, un jeu, s'était transformé à sa mort en vérité. Il était devenu véritablement mauvais, payant ses pêchés et le meurtre qu'il avait commis.

« Je vous rends vos paroles, vous ignorez de quoi vous parler. »

Ce n'était qu'une humaine, elle ne pourrait jamais aider un médium, elle n'était rien, tout simplement. Malgré tout, cet échange verbal excitait en quelque sorte Furfur et il avait envie de sauter à la gorge de Tamina, de l'étouffer, lui faire du mal mais c'était impossible, il ne pouvait pas. Pas maintenant, mais quand il aurait trouvé un hôte, il ne manquerait pas de se déchaîner. Un rire sarcastique franchit sa bouche quand Tamina affirma être forte.

« Oh non, si on doit dire que quelqu'un est fort ce serait moi, ou peut-être Maddox. Je ne chercherais pas une autre victime surtout quand on sait que tu as perdu d'avance. »

Il se délecterait d'elle et avait hâte de la voir à genoux. En un éclair, Alastair fut devant la femme et leva sa main, il ne provoqua qu'un courant d'air, incapable de toucher tout être vivant. Son regard vert clair brillait d'un éclat étrange, d'une violence contenue pour l'instant mais cela ne durait pas éternellement. La promesse qui y était, était pire que tout.

« Tout ceci ne fait que commencer et signe ta fin. A bientôt. »

Souffla-t-il avec une tendresse mauvaise et soudainement, il disparut. Il avait ravalé son énergie qui le maintenait visible, devenant invisible. Le mauvais esprit fit volte-face, et commença à s'enfoncer dans le parc, s'éloignant de l'humaine. Le jeu ne faisait que commencer et il avait hâte de voir cette partie. Il avait hâte de voir tout ce beau monde se débattre. La fin ne serait que plus délicieuse sincèrement.